Notes de programme de certaines oeuvres de Georges Aperghis.
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Alter-Face
2004 - Pour Jean-Luc Fafchamps et Jean-Luc Plouvier
pour deux pianos. Alter-Face sur le net
Créé le 23 octobre 2004 à l'opéra de Lille. Jean-Luc Fafchamps, Jean-Luc Plouvier, pianos.
Pour peu qu'on se plonge dans l'histoire du genre - de Brahms à Messiaen, par exemple - on refusera à Alter-Face le titre de "deux pianos", site privilégié de la force et de la virtuosité, où le brio le dispute au charme du beau phrasé. Appelons l'oeuvre d'un nom nouveau : Alter-Face, "double piano".
Soit deux pianos face-à-face, chacun supportant son double qui l'altère, qui n'est ni le même ni l'autre, mais son reflet brouillé. L'image tremble. Une neige légère occupe l'écran. Des formes dansantes envahissent le champ visuel du presque-endormi qui s'est trop frotté les yeux (ce que René Daumal appelait : les phosphènes). Mille phosphènes dans Alter-Face, mille pixels sonores, mille accords volants, décentrés, cherchant un point de gravité à jamais perdu, "tournant dans l'air du soir”. Ou encore, comme le suggère le compositeur : vibration discrète et tintinabulante des cristaux d'un grand lustre, tandis qu'on donne à l'étage un bal sur chaussons de feutre.
On peut entendre dans Alter-Face comme un hommage à la musique de Morton Feldman : retour perpétuel de petits motifs obsédants - un retour décalé, inattendu, asymétrique, qui vexe tout sentiment d'anticipation. On n'y respire pas, pourtant, le temps infiniment dilaté du Sphinx new-yorkais : comme toujours chez Aperghis, le temps est ici minuteusement strié, palpitant, fibré, découpé à même le muscle. C'est dans ce réseau serré que les deux interprètes se démènent face-à-face, sans un cri, jamais tout à fait libres ni totalement rejoints.
JL Plouvier
A Tombeau ouvert
1997 / 2000 - Pour Vincent Leterme
pour piano
Durée : 20 minutes
Création : le 16 décembre 2000 à la Maison de la Radio - Paris, par Vincent Leterme
La simplicité des variations du début ne laisse pas présager les incidents qui émailleront peu à peu le parcours de A Tombeau ouvert. Un certain nombre d'évènements récurrents brouillent le mouvement continu et dérangent la linéarité tranquille de cette pièce. Telle une pierre qui roule, l'œuvre file droit à sa fin, pianissimo dans les aigus, comme un faux apaisement final : le chaos demeure le maître mot de cette course.
Georges Aperghis
A tombeau ouvert . Les secrets élémentaires . Print Music . Simata . Pièce pour jeunes pianistes, "Works for piano", CD NEOS 10912
Avis de tempête
Voir la page dédiée à cette oeuvre
Babil
1996
pour clarinette solo et quinze instrumentistes
Durée : 15 minutes
Créé en 1998 par Armand Angster et l'ensemble Ars Nova dirigé par Philippe Nahon
Babil est, à l'heure actuelle, le seul concerto écrit par Georges Aperghis. Bien qu'il comporte des séquences enchaînées et non des mouvements, c'est un “vrai” concerto, qui exploite les possibilités expressives de l'instrument soliste et en tire une tension thématique. La clarinette pouvant être aussi bien volubile et extravertie que d'une douceur nostalgique et intériorisée, Babil est bâti sur une antithèse de figurations. D'un côté l'animation, voire l'excitation, de l'autre un apaisement teinté de mélancolie (ou de résignation ?).
Un premier épisode oppose des cellules aussi agitées que péremptoires, dans leur vigueur martelée, à des figures paisibles, un peu accablées, sur lesquelles elles prennent nettement le pas. Les silences ne font que préparer des irruptions successives et la clarinette solo reste enfermée dans la matière sonore de l'orchestre, parasitée qu'elle est, principalement par les bois. Elle impose enfin son sympathique “babil” et les cordes, qui jusque-là n'en menaient pas large, prennent timidement la parole, prudemment repliées sur un minuscule intervalle.
La fébrilité du début tend dès lors à s'évacuer, non sans une vigoureuse résistance des cuivres. De longs glissandi descendants et montants du soliste imposent progressivement un autre climat et se propagent aux cordes, tandis que la clarinette s'ébat dans une brève et joyeuse cadence. On est vite amené à un épilogue lent, Adagio teinté de nostlagie et d'errance, où le chant microtonal de la clarinette est doucement soutenu par l'ensemble. la mélodie voilée a triomphé des effets rythmiques.
Antoine Gindt
Bloody Luna
2007 - Pour Sonia Wieder-Atherton et l'ensemble Remix
pour violoncelle solo et ensemble instrumental
Durée : 15 minutes
Création : 23 février 2007, Casa da Mùsica Porto, ensemble Remix, Sonia Wieder-Atherton (vcelle), Diego Masson (dir).
“Chaque mois, la lune a un hiver et un été. Et elle a des froids plus intenses et des chaleurs plus grandes, et ses équinoxes sont plus froids que les nôtres.”
“Pendant l’éclipse du soleil, quand le corps de la lune est en face de nous et nous apparaît au milieu de l’astre, une partie de son éclat nous fait un peu penser à du fer en fusion. Ceci tient à la lune, qui emprunte cet éclat aux étoiles, et non à la terre obscurcie.”
Breaths
2019 - pour Nicolas Hodges
pour piano
Durée : 10 minutes
Création : le 20 octobre 2019 au festival Transit (Louvain) par Nicolas Hodges
Respirations, le piano qui respire, tantôt asthmatique, tantôt haletant, tantôt essoufflé, tantôt manquant de respirations, parfois oubliant de respirer, il s'asphyxie lui-même, fait des efforts pour retrouver son air. C'est le paradoxe de cette pièce, faire respirer un instrument qui n'ai rien à voir avec le souffle.
Georges Aperghis
Champ-Contrechamp
2010 - Pour Nicolas Hodges et le London Sinfonietta
pour piano et ensemble instrumental
Durée : 15 minutes
Création : le 20 août 2011 pour les Proms de la BBC/Londres, London Sinfonietta, David Atherton (dir), Nicolas Hodges (pno).
Champ-Contrechamp est un terme emprunté au langage du cinéma. Il veut dire que lors d'un dialogue par exemple, la caméra est tantôt en train de montrer un personnage et tantôt un personnage qui lui fait face. On passe sans transition de l'un à l'autre. Dans cette sorte de "concerto pour piano et ensemble", il s'agit de montrer 2 points de vues : celui du soliste et celui de l'ensemble. Parfois, le soliste crée un espace sonore dans lequel se moule l'ensemble et parfois l'ensemble crée un espace sonore dans lequel le soliste s'inscrit. C'est un jeu entre résistance passive et résistance active entre les 2 parties. Le piano "parle" comme dans un "récitatif", l'ensemble semble lui répondre et soudain un malentendu entre les 2 crée une tension qui se résout de différentes façons.
Pour la 1ère fois, en élaborant la pièce j'ai autant insisté sur des contrastes entre un minimalisme d'une grande fragilité et un maximalisme tonitruant. C'est aussi un autre Champ-Contrechamp.
Georges Aperghis
Ecoutez Nicolas Hodges parler de la pièce
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Cinq pièces pour percussion et violoncelle
1992/93 - Pour Françoise Rivalland et Elena Andreyev
Durée : 15 minutes
Création : le 28 avril 1994, studio 104 de la maison de la radio, Paris, par Elena Andreyev et Françoise Rivalland.
Douleur, maladie : Georges Aperghis a souvent recours à ces mots pour parler de ses œuvres (et non de la composition : je n'ai jamais entendu chez lui la moindre allusion à un quelconque pathos de la « création »).
Il dit ainsi, de cet instrument nommé espérou qu'il a imaginé avec Françoise Rivalland, Eléna Andreyev et le luthier Sylvain Ravasse , que c'est « un violoncelle malade ». Un violoncelle « affecté », qui prolonge et fait pendant au violoncelle « en bonne santé » des Cinq pièces.
L'invention organologique découle ici très exactement de la nécessité de l'écriture, conçue comme captation d'un « monde viscéral » : la musique transporte « dans l'intérieur d'un ventre, dans les plis d'un corps qui bouge, au milieu du courant continu qui meut les viscères ». Et c'est comme « déconnectés du corps » qu'on entend les voix des deux instrumentistes - leurs voix de tête, aimerait-on dire, dont le port (de tête) est emporté dans le flux.
Peter Szendy
Contretemps
2006
pour soprano et ensemble instrumental
Durée : 30 minutes
Création : le 29 août 2006, Salzburger Festpiele, Klangforum Wien, Donatienne Michel-Dansac (sop), Johannes Kalicke (dir).
“Événement soudain, inattendu, qui vient compromettre la réalisation d'un dessein, d'un projet.”
La pièce se présente comme un combat : combat entre la voix et les instruments, combat entre séquences, combat entre fragments parasites. Rien ne peut se dérouler normalement et jusqu'au bout. Toujours il y aura un empêchement, un détournement, une dénégation de ce qui vient d'être entendu. Le discours linéaire est ainsi mis à mal, au profit d'une “spirale”,qui fait tourner les éléments musicaux, les fait s'affronter, les fait dériver, les met dans des devenirs inattendus.
Dans cette étude sur le mouvement discontinu, les fragments fonctionnant comme “résistances” font dévier l'écoute et créent de fauses pistes, avant d'être eux-mêmes pris dans ce labyrinthe mouvant.
La position de la voix, tantôt au millieu de l'effervescence, tantôt au bord, tantôt seule, ne fait qu'augmenter le trouble. Mon pari, en écrivant cette partition, était de dégager un maximum d'énergie grâce au devenir de cette forme sans cesse déchirée et bousculée, tout en créant l'illusion d'une dramaturgie plausible.
Une image m'a accompagné pendant l'écriture de “Contretemps, c'est un tableau de Pau Klee : Vor dem Blitz
Georges Aperghis
Teeter-Totter . Contretemps . Seewsaw . Parlando, CD Kairos 0013222KAI
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Crosswind
1997
pour alto et quatuor de saxophones
Durée : 15 minutes
Création : 15 avril 1998, Wittener Täge für Neue Kammermusik, Geneviève Strosser (vla), ensemble Xasax.
Comme dans beaucoup d’œuvres de musique de chambre de Georges Aperghis, le langage entre en jeu. De cette conversation entre les interprètes, seul quelques bribes sont compréhensibles : l’essence de la musique est ici d’être langue étrangère.
Au moment de concevoir Crosswind Aperghis s’était intéressé aux écrits sur le comportement de Kondrad Lorenz. « Il ne s’agit pas d’une ressemblance entre le comportement d’un animal et celui d’un homme (..) Il n’y a plus ni homme ni animal, puisque chacun déterritorialise l’autre, dans une conjonction de flux, dans un continuum d’intensités réversibles. Il s’agit d’un devenir qui comprend au contraire le maximum de différence comme différence d’intensité, franchissement d’un seuil (…). Il s’agissait pour moi dans Crosswind de l’idée du territoire de chacun. On a l’impression d’écouter une meute face à une victime qui est manifestement l’alto. On ne sait pas exactement ce qui se passe à la fin, mais c’est sans doute une confrontation animale.
Patrick Hahn
Crosswind . Alter ego . Rasch . Volte-Face . Signaux, CD Kairos 0012942KAI
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Le corps à corps
1978
pour un percussioniste et son zarb. Regardez Le corps à corps sur le net by Jean-Pierre Drouet by Françoise Rivalland and by Vanessa Porter
Durée : 10 minutes
Création : 6 août 1979, Festival de la Sainte-Baume par Jean-Pierre Drouet.
Le percussionniste est à la fois le narrateur d'une histoire épique et le personnage central de la pièce.
Dans le combat singulier de la fiction se reflète celui du musicien avec l'instrument et avec son propre souffle.
Cette pièce est dédiée à Jean-Pierre Drouet.
Georges Aperghis
Dans le mur
2008 - Pour Nicolas Hodges
pour piano et électronique
Durée 15 minutes
Création le 27 mars 2008 à l'Auditorium du Musée d'Orsay-Paris, par Nicolas Hodges - Electronique Sébastien Roux.
Après Machinations (2000) et Avis de Tempête (2004), Georges Aperghis revient à l'Ircam pour une nouvelle création, Dans le mur, œuvre purement instrumentale où la théâtralité, le sens des situations et l'engagement physique de l'interprète occupent néanmoins une place centrale. Une dizaine de séquences électroniques, sortes d'agglomérats de fragments issus de la grande littérature pour piano du XIXe siècle, s'y succèdent : chacune est comme un mur sur lequel le soliste tente une intervention, réagissant par des gestes qui tantôt agressent et nient la surface, tantôt essayent d'en suivre la courbure. L'œuvre cherche à retrouver, à travers le jeu du pianiste, le geste d'intervention du grapheur urbain.
Nicolas Donin
"Images d'une œuvre n°4", un reportage sur la création proposé par l'IRCAM
Dark Side
2004
pour mezzo-soprano et ensemble instrumental
d'après L'Orestie d'Eschyle, traduction de François Regnault
Création : le 15 mars 2004 à Athènes, Megaron, par Marianne Pousseur (mezzo-soprano) Ensemble Intercontemporain, Jonathan Nott (dir).
Le livret de Dark Side est lisible en ligne ICI.
Il s'agit d'une hallucination au présent comme si Klytemnestre vieille de trois milles ans ressassait encore d'une façon désordonnée, son désir amoureux partagé, son attente interminable, sa volonté de vengeance, le meurtre de son mari : l'ambivalence entre l'amour et la haine.
Son double langage n'a rien perdu de sa vigueur.
Partant de là, je n'ai rien voulu expliquer du comportement de ce personnage, j'ai seulement essayé de mettre côte à côte des moments imaginaires de sa vie.
C'est la construction musicale qui m'a dicté la dramaturgie de cette sorte de cauchemar. Il s'agit d'une construction à facettes en contraste, sans continuité apparente, qui essaie d'ouvrir des espaces mentaux qui semblent appartenir à des échelles différentes.
Il s'agit donc d'une série de fragments formant une sorte de chapelet hétéroclite qui prétend une fois égrainé trouver sa cohérence.
La chanteuse prise dans ces espaces musicaux doit passer d'un comportement vocal à un autre, sans délai, comme une pensée en train de se faire sur le moment.
Georges Aperghis
De la nature de l'eau
1974
pour 6 chanteurs, 2 comédiens, percussion et piano
D'après un texte de Léonard de Vinci
Durée 17 minutes
Création 30 Juin 1974 – Rencongtres Internationales d'Art Contemporain de La Rochelle, ensemble Polyphonique de l'ORTF, Daniel Chabrun (dir).
Plusieurs convives, à la fin d’un dîner, engagent une discussion sur la nature de l’eau. Au milieu de ces voix de chanteurs, de cette discussion bienséante, deux voix incongrues, celles parlées de l’acteur et de l’actrice qui se déclarent leur amour. Perturbation, gêne.
Tels Roméo et Juliette, ils meurent dans les convulsions de la passion. Le calme se rétablit.
Georges Aperghis
Déclamations
1990
pour baryton, clarinette basse et orchestre
Durée : 20 minutes
Créé au Festival Musica à Strasbourg par Spyros Sakkas (b), Armand Angster (cl), Rundfunk Sinfonie Orchester Saarbrücken dirigé par Grzegorz Nowak
Œuvre dédiée « à mes fils »
Sous le soleil, Déclamations d’un homme seul, avec son ombre (la clarinette basse), et le mirages qui l’environnent (l’orchestre).
Georges Aperghis
Der Lauf des Lebens
2017-2018 - pour Klangforum Wien, les Neue Vocalsolisten Suttgart et Emilio Pomarico
2 flutes (also piccolo and Bass fl), hautbois, 2 Clarinets (also Bass Cl), Bassoon, Saxophon, Horn, Trumpet, Trombon, Accordion, Harp, 2 pianos, 2 percussions, 3 violins, 1 viola, 2 cello, double bass
Soprano Collorature, Soprano, Mezzo-Soprano, Tenor, Baritone, Bass
Durée : 1 heure
Création le 2 septembre 2020, Musikfest Berlin, Kammermusiksaal der Philarmonie par les dédicataires de la pièce
Co-commande de Musik der Jahrunderte et du Klangforum Wien financée par la Fondation Ernst Siemens
« Der lauf des Lebens, le cours de la vie.
Sur la grande route – faire route ensemble à trois, à deux, soudain une foule qui marche, des figures, familières – étranges, certaines masquées, au milieu des gens puis à côté, puis tout seul. Traversées, fêtes, la vie avance, nous avançons, faisons musique ensemble, tantôt intimes tantôt extravagantes, joies, peurs, pensées, paniques se succèdent et nous avançons toujours accompagnés par les défunts qui volent autour de nous, tantôt à gauche, tantôt à droite, bonnes ou mauvaises augures, nous continuons solitaires ou faisons bloc, nous gravissons la montagne, nos musiques nous accompagnent jour et nuit, arrivons au sommet, puis..... »
Georges Aperghis – février 2018
Die Hamletmaschine-oratorio
1999-2000
Solistes : soprano, 2 barytons, alto et percussionniste
Choeur mixte (9 sop. 9 contralto, 9 ténor, 9 basse)
Flûte, hautbois, 2 clarinette, 2 cor, trompette, trombone, tuba, percussionniste, piano (aussi orgue), violon, alto, 2 violoncelle, contrebasse
Durée : 1 heure
Créé le 30 septembre 2000 au festival Musica de Strasbourg par Jean-Pierre Drouet, Françoise Kubler, Vincent le Texier, Jean-Marc Salzmann, Geneviève Strosser, SWR Vokalensemble Stuttgart, l'ensemble ictus dirigé par Georges-Elie Octors.
Pour découvrir Die Hamletmaschine-oratorio repris au festival Acht Brücken 2019 interprété par Asko|Schönberg dirigé par Bas Wiegers, SWR Vokalensemble Stuttgart, Sarah Aristidou, Geneviève Strosser, Holger Falk, Romain Bischoff et Christian Dierstein.
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Dix pièces pour quatuor à cordes
1982-1986
Durée : 33 minutes environ
Créé le mardi 16 septembre 1986 au Festival Musica (Palais des fêtes), Strasbourg, par le Quatuor Arditti
Les Dix pièces sont inspirées du « journal de bord » du compositeur. Elles tirent leur raison d'être de ce climat d'intimité. Les pièces n°1, 2 et 3 ont été interprétées à Musica 84 par le Quatuor à cordes de Paris.
Note de programme du festival Musica.
Études pour orchestre I à VI
2012-2014
Durée : 32 minutes environ
Consulter les partitions sur ISSUU, ICI
Écoutez l'émission du journaliste Arnaud Merlin et découvrez les Étude IV, V et VI lors du Festival Acht Brücken 2019, interprétées par le WDR Symphonieorchester dirigé par Brad Lubman
Les 6 Études sont publiés par le label NEOS CD 11728, enregistrement live du Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks dirigé par Emilio Pomarico
Et sur YOUTUBE c'est ICI
Façade-trio
1998
pour deux clarinettes basse et percussion
Création : le 29.09.1999, Strasbourg, Festival Musica, Auditorium FR3-Alsace, par Jean-Marc Foltz, Sylvie Brucker, Guy Frisch
Durée : 15 minutes
Face, façade : chacune des combinaisons que peut fournir un accord selon que l'on prend pour la note la plus basse l'une ou l'autre de celles dont il se compose.
Trio, triones : nom qu'on donnait autrefois aux étoiles qui forment la Grande et le Petite Ourse.
G. Aperghis
Faux Mouvement
1995
trio à cordes
Durée : 9 minutes
Création : février 1997, Théâtre du Renard à Paris, Elena Andreyev (vcl), Gilles Deliège (vla), André Pons-Valdès (vlon).
La forme abandonne alors très vite les schémas rigoureux, se détournant « de ce qui est trop linéaire, de ce qui existe en soi sans contradiction, de ce qui commence et s’achève sans réserver de surprise : il lui faut conserver les phénomènes de tension et de détente, accepter les simples juxtapositions et ne pas refuser d’intégrer la digression dans l’ordre et l’unité ». Le compositeur multiplie ou entrecroise la parenthèse de l’autre. (cf. Daniel Durney, La règle du jeu)
Propos recueillis par François-Gildas Tual en octobre 2000
C’est toujours au lexique du corps que le trio Faux mouvement emprunte son titre. Pour dire un geste brisé, morcelé. Un « jeu d’empêchement », une luxation entre des motifs « qui ne se développent pas, qui sont juste là pour empêcher les autres d’exister ».
En cela, c’est vrai, Faux mouvement n’est pas non plus un Satz, un mouvement au sens musical du mot.
Peter Szendy
Fidélité
1983
pour harpe solo
Durée : 16 minutes
Créé le 25 juillet 1983 au Festival d'Avignon par Brigitte Sylvestre
Comme dans beaucoup d'oeuvres de Georges Aperghis, la voix parlée ou chantée, le geste (qu'il engendre la production du son ou l'évocation d'une situation) sont étroitement liés et font partie intégrante de la composition. Dans cette pièce écrite pour Brigitte Sylvestre, le geste de la harpiste, saisi dans l'action propre de préparation des sons, est associé à la parle et au chant. Pour évoquer « un moment » de la vie de la femme interprète, cette parenthèse privilégiée où tout pourrait être dit, se trouvent étroitement liés : les rapports de la femme avec son instrument (joie de pouvoir jouer), avec la musique (inquiétude de l'interprète face au langage des sons) et son identité propre vis-à-vis de sa vie de femme (épouse). Ce triangle forme un monde qui se déchire.
Découvrir Alice Belugou qui interprète cette pièce solo
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Les guetteurs de sons
1981
pour 3 percussions. À Jean-Pierre Drouet, Gaston Sylvestre et Willy Coquillat. Regardez Les guetteurs de sons sur le net, trio We Spoke
Création en juin 1981, Festival de Saint-Denis, Théâtre Gérard Philippe, par le trio le Cercle (J.P Drouet, G. Sylvestre, W. Coquillat).
Le silence, Les sons Dans la tête. Au dehors.
Trois musiciens côte à côte.
Trois individus, ou trois versions du même ?
Instruments identiques pour les trois.
Instruments qui jouent parfois tout seuls, malgré la volonté des interprètes pour leur plus vif étonnement, ou qui servent à modeler des sons comme si ceux-ci étaient palpables.
Le mécanisme est ici monté : silence - volonté de produire un son - transmission aux bras, aux mains, aux doigts.
Production du son - écoute.
Les mains des percussionnistes travaillent parfois indépendamment de leurs corps. Eux-mêmes en sont surpris.
Tout ceci donne lieu à des petites séquences tendres et comiques pendant lesquelles des connivences se créent entre les trois musiciens qui modèlent les sons pour lutter contre le silence.
Qui aura le dernier mot ?
Georges Aperghis
Happy End
2007 - Pour l'ensemble Ictus
pour ensemble et électronique
Texte bilingue français/anglais avec les voix d'Edith Scob et Michael Lonsdale - d'après "Le petit poucet" de Charles Perrault
Durée approximative : 1 heure
Création : le 7 décembre 2007, Opéra de Lille, ensemble Ictus, Georges-Elie Octors (dir), Sébastien Roux (RIM IRCAM), film d'animation Hans op de Beeck, Bruno Hardt et Klaas Verpoest.
Né en 1969, Hans Op de Beeck s'est signalé par d'énormes installations à échelle réelle représentant des sites ubains imaginaires, ainsi que des installations vidéos, des dessins, des films d'animation. Son univers est imprégné d’une douce désolation, d’une solitude ironique. Non pas dénonciation révoltée d’un monde féroce, mais exploration calme d’un univers où c’est déjà trop tard : tous autant que nous sommes, nous y sommes en exil, décentrés, consentants, en attente d’un événement qui ne surviendra pas. En collaboration avec Bruno Hardt et Klaas Verpoest, Op de Beeck a conçu pour "Happy End" un film d'animation au ryhme lent - une errance illimitée dans de vastes cités imaginaires. A cette longue dérive répond la musique d'Aperghis, motorique, inarrêtable, et saturée d'ambigüité : elle semble toujours combinaison vacillante de deux ou trois sources musicales différentes, équarries dans une grille rythmique dessinée au rasoir.
Les voix de Michael Lonsdale et Edith Scob, enfin, travaillées avec Sébastien Roux (à l'IRCAM, toujours), en une stupéfiante partition électronique qui tient du manga, du dessin animé et du jeu vidéo, racontent l'histoire du Petit Poucet - la perte et l'errance, mais aussi la ruse et le courage de celui qui a tout perdu. (JL Plouvier)
La perte de traces, la mémoire altérée, les repères disparus au sein de "mixages" inédits, les codes changés, méconnaissables, les notes émiettées qui s'envolent, le chapelet mélodique dispersé, les mots vides de sens, l'amnésie et l'angoisse qui s'en suit, les efforts de se souvenir, de retrouver un sens, une route, la peur d'être "seul" à jamais, au milieu des foules, des cités gigantesques... Essayer de retrouver ce que jadis étaient la « musique », le « verbe », les « gestes quotidiens ». (G.A.)
Bande-annonce disponible sur Vimeo.
Sur le site de l'ensemble ictus, retrouvez plus de détails
Histoire de loups
1976
Opéra pour 8 voix solistes, 4 barytons et 9 musiciens
Création les 26, 27, 29, 30 et 31 juillet 1976 au Cloître des Célestins - XXXè Festival d'Avignon. Reprise Atelier lyrique du Rhin le 10 mars 1977.
Musique : Georges Aperghis | Texte : Marie-Noëlle Rio (d'après S. Freud) | Direction musicale : Yves Prin | Dramaturgie et mise en scène : Pierre Barrat | Scénographie : Yannis Kokkos | Eclairages : Alain Banville | Assistant décorateur : François Hoang
en coproduction avec l'Atelier Lyrique du Rhin
VOIR LA PAGE DEDIEE A CET OPERA sur ce site.
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Il Gigante Golia
1975
pour soprano et 16 musiciens
d'après un motet sarde
Durée : 10 minutes
Création : 15 septembre 1975, Biennale di Venezia, Elise Ross (sop), ensemble Anton Webern, Marcello Pani (dir).
Il s'agit de « Variations d'humeur » où la chanteuse se retrouve, pour ainsi dire, au milieu de l'arène.
Il Gigante Golia est un dialogue entre la soprano et l'orchestre dont le sujet est tiré de la célébration en Sardaigne de la légende de la mort du géant Goliath, avec des références aux champs populaires sardes et aux effets aussi « étranges » que ceux d'une chasse, une émeute ou le passage d'une fanfare de village.
Georges Aperghis
In Extremis
1998
pour 8 musiciens (1.0.0.0-1.0.0.1, perc, pno, str. (0.0.1.1.1))
Durée : 15 minutes
Création le 4 février 1999, Poitiers, Conservatoire National de Région, Ensemble Ars Nova, Philippe Nahon (dir)
In extremis, sorte de concerto grosso, oppose des vents difficiles à apparier (flûte, cor, tuba) à un trio de cordes (alto, violoncelle, contrebasse) tiré vers le grave, le piano et la percussion participant de leur côté à un processus conflictuel. L'instrumentarium insolite n'est pas la seule justification du titre. Les données de la composition, présentes d'emblée dans l'agitation contenue de l'introduction, ne se dévoilent que progressivement et n'atteignent à une totale clarté qu'in extremis, dans le dialogue de sourds entre un tuba colérique et un piano rasséréné. Chemin faisant, chaque soliste tour à tour aura fait assaut de véhémence joyeuse ou de calme affiché.
Intermezzi
2015-2016, 2020 - Pour Musikfabrik
pour 16 musiciens (1.1.1.1-1.1.1.1, perc, 2 pno, str. (1.1.1.1.1))
Durée : 1 heure
Création le 21 septembre 2020, Philarmonie de Cologne par l'Ensemble Musikfabrik
commissioned by Ensemble Musikfabrik, musica viva of Bayerischer Rundfunk and sponsored by Kunststiftung NRW
Intermezzi de Georges Aperghis, œuvre pour ensemble non dirigé, est la rencontre et la collision entre le compositeur et les 16 musiciens de l’ensemble Musikfabrik, dédicataire de l’œuvre.
Développant une musique puissante, théâtrale, vocale, telle un « grand corps qui respire », la pièce se construit en intermèdes qui se chevauchent, se coupent et s’élancent formellement, ouvrant et fermant des portes musicales. Le corps du musicien est une matière organique modelée et projetée scéniquement dans son entièreté. L’existence de chacun est éprouvée au sein du groupe, par moments tel un discours solitaire, cri du corps retiré de sa masse.
« Pour trouver mon énergie je profite du fait de savoir que vous allez relayer cette énergie. Je suis à l’affut des coïncidences, ce qui m’intéresse le plus est la rencontre entre mes problèmes et ce qui m’est proposé. »
Composée pour l’ensemble Musikfabrik, Intermezzi en exploite toute la diversité : du jeu solo à la musique de chambre, maniant tantôt la voix, tantôt les instruments à double-pavillons…
« Ces choses reviennent dans des positions différentes, comme un carrousel qui tourne : le public les découvre chaque fois dans une syntaxe différente. »
Intermezzi est une œuvre forte, un tournant pour Georges Aperghis tel qu’il le définit lui-même : « Cette manière d’avoir une grande amitié musicale pour chacun de vous me pousse à faire une pièce qui ne serait pas la même s’il n’y avait pas ce processus là. Intermezzi, c’est une pièce qui m’étonne moi-même, son processus me surprend. »
La pièce se développe comme un self-portrait de Musikfabrik, que Georges Aperghis façonne par l’utilisation de chaque membre dans sa plus grande altérité. Cette création si particulière, œuvre décapante, drôle, extravagante, curieuse, effrénée est unique pour l’ensemble, tel un « statement » scénique.
Les citations sont tirées d’une interview réalisée en mars 2016 avec Georges Aperghis.
Jactations
2001 - A Lionel Peintre
pour baryton seul
Durée : 30 minutes
Création : 2002, Festival Musica-Strasbourg par Lionel Peintre.
« Jactations : agitations désordonnées qui s'observent dans certains troubles nerveux liés à l'anxiété. »
Après Quatorze Récitations, Georges Aperghis confie à la voix de baryton un théâtre vocal, plein d'éructations, d'infirmités, d'éclats. La pathologie est virtuose ! Contre tout esthétisme, cette minutieuse observation éclaire les différents états humains : une pensée n'en remplace pas une autre, une attitude ne triomphe pas d'une posture antérieure mais s'y juxtapose, tout aussi impérieuse et grotesque.
CD Tingel Tangel — Jactations, Vand’œuvre Réf. 0426/Distribution Muséa, Metamkine, les Allumés du jazz, Improjazz
Kryptogramma
1970
pour 6 percussionnistes
Durée : 17 minutes
Création : 12 juillet 1972 au Festival au Marais à Paris par les Percussions de Strasbourg.
Kryptogramma : ce qui est écrit en caractères secrets, en code, en langage chiffré. En effet, cette œuvre est construite à partir de rythmes empruntés aux chefs d’œuvre classiques qui se trouvent « codifiés », de telle sorte qu’ils deviennent indéchiffrables. Au début de la partition, un certain nombre de rythmes simples sont exposés puis, sur leurs développements, s’amorcent, d’une part un canevas de mouvements ascendants, d’autre part de grandes fluctuations de densités. A partir de ce moment, l’œuvre se développe par une série de variations (continues ou entrecoupées) sur les relations des intervalles et des rythmes découlant des mouvements ascendants.
Georges Aperghis
Les lauriers sont coupés
1975 - A Charles Ravier
pour soprano, mezzo-soprano, flûte, hautbois/cor anglais, basson, trombone et alto
Durée : 20 minutes
Création : 29 juillet 1975 au festival d'Avignon par l'Ensemble Polyphonique de Paris dirigé par Charles Ravier, Véronique Dietschy (Soprano) et Amelia Salvetti (Mezzo-Soprano).
...le corps des interprètes (musiciens, acteurs, chanteurs, etc.) tend à s'émanciper, à signifier, à raconter, en plus de sa pratique spécifique. L'expression vocale s'est diversifiée à l'extrême et n'est plus l'attribut des seuls chanteurs. A travers toutes ces pulvérisations dynamisantes, nous nous trouvons devant une polyphonie possible, constituée par plusieurs microlangages, capables de créer une énergie physique et émotive en provoquant des confrontations violentes entre le sens d'une image ou d'un son et une signification purement formelle.
Georges Aperghis
Liebestod
1987
pour récitante, 8 chanteurs et 9 musiciens
Texte de Bettina Van Arnim
Durée: 145 minutes
Création : 1987 au Théâtre National de Chaillot, Orchestre Philharmonique de Paris, Yves Prin (dir)
Une partie du livret est lisible en ligne ICI.
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
La Nuit en tête
2000
pour violon, violoncelle, flûte, clarinette, piano percussion et soprano
Durée :14 minutes
Créé le 16 décembre 2000 au Festival Présences Radio France-Paris par l'ensemble S:i.c avec Donatienne Michel-Dansac (sop)
« Les rumeurs de la nuit de carnaval s'éteignent, le carillon de la tour sonne six heures » nous dit Schumann. La Nuit en tête devait être un «nocturne», non pas nuit mais appréciation personnelle de la nuit, en tête ou entêtée, à la tête de ou dans la tête, image multiple et inattendue, un peu à la Char, fuyante encore dès que le compositeur tente d'en saisir l'idée. « Le projet était d'écrire cinq ou six mouvements brefs se développant indépendamment puis de les laisser s'enchevêtrer les uns dans les autres, l'oreille ne devant plus différencier les couleurs distinctives de chacun ».
La nuit en tête :sans doute faut-il entendre ce titre, non pas comme la transcription a posteriori d'une nuit imaginaire, programmée et calculée de tête dans ses effets, mais plutôt comme la nomination étonnée de ce qui s'est écrit, là, en tâtonnant du bout des doigts et depuis le corps à corps de l'écriture, dans un entêtement qui n'a rien à voir avec un volontarisme conscient. Il faut l'entendre au sens où l'on dit aussi d'une mélodie qu'elle est entêtante, ou entêtée : insistante, obsédante, comme une douleur lancinante dans le corps.
La nuit en tête, ce sont, selon les mots de Georges Aperghis1 ,des « agglomérats de sensations » : « jeux d'enfants », « processions nocturnes », « états d'âme furtifs ». Et ces agglomérats sont mobiles (« comme des sables mouvants »), portés par une harmonie elle-même « glissante » entre des « accords connus » et des quarts-de-ton qui lui confèrent d'étranges irisations2 . C'est, dit-il encore, l'inscription d'une intense « énergie », d'une « trépidation permanente, mais comme étouffée dans l'obscurité ».
Peter Szendy
1-Toutes les citations qui suivent, entre guillemets, renvoient à ses mots, notés à la hâte au cours d'une conversation le 22 janvier 2002.
2-De fait, ce sont pour lui les microintervalles qui fabriquent la luminosité - aussi faiblement nocturne soit-elle -, tandis que les accords identifiables restent « opaques »
Musique(s) de chambre: 5 pièces pour espérou et violoncelle . Faux mouvement . Les secrets élémentaires . Requiem furtif . La nuit en tête, CD Zig Zag Territoires ZZT 020501 - Ensemble S:i.c.
Luna Park
2011
Une heure.
Textes de G.Aperghis et François Regnault.
Spectacle pour 2 flûtes, un percussionniste, une actrice et électronique.
Création le 8 juin 2011 à l'Espace de projection de l'IRCAM dans le cadre du festival Manifeste. Avec Eva Fürrer, Johanne Saunier, Richard Dubelski et Mike Schmid. Musique et mise en scène de Georges Aperghis, Lumières/Installation/Vidéo Daniel Lévy,
Commande IRCAM-Centre Pompidou et du festival International de Musique Contemporaine Automne de Varsovie.
Comment réussir à voir sans être vu ?
Comment surveiller ses voisins chez eux, dans la rue, dans leur vie de tous les jours en restant derrière un écran ?
Dans Luna Park, chacun surveille l'autre.
Les 4 interprètes, placés côte à côte, n'ont entre eux que des contacts virtuels, jamais physiques ni directs, obligés de passer par le "circuit" : micros, caméras de surveillance, écrans, hauts parleurs espions.
Chacun se regarde dans sa caméra comme dans un puits profond, entretient un rapport presque amoureux avec elle et aussi avec sa propre image.
Une tentative d'auto-surveillance ?
Comme le raconte Thomas Bernhard dans son texte "Marcher", il est pourtant absolument impossible de se surveiller soi-même; le fait de savoir que l'on se surveille fait que l'on change d'attitude, on s'échappe, on devient quelqu'un d'autre.
Dans cette machinerie technologique, quelle est la place du corps ? Quelle est sa fonction ? Comment réagit-il aux machines qui s'emballent ? Est ce qu'il ne devient pas uniquement "oeil" et "oreille" ?
Ainsi, les interprètes deviennent eux-mêmes caméras, eux-mêmes micros; ils se mettent à parler à leur place, détaillant ce qu'ils voient, racontant des petites histoires vues, surveillées, filmées, avec des mots mais aussi avec des chiffres (time-code, mesure du passage du temps pendant une séquence).
En fonction de l'image projetée et de ce qui se passe sur scène, il y aura des jeux de proximité, des superpositions, des mixages.
Cela peut être alors drôle ou angoissant comme un manège de Luna Park.
Le dispositif de Luna Park s'apparente à un retable où les deux figures verticales (les flûtistes Eva Furrer et Mike Schmid) encadrent deux figures "assises" (Johanne Saunier et Richard Dubelski, dont le geste sera "suivi" par les capteurs du mouvement).
Les polyphonies musicales sont construites à partir de fragments de phrases, de mots, des phonèmes, de chiffres. Déconstruction et reconstruction de ce que les autres ont dit. Les souffles, les respirations sont prolongées par les instruments (flûte basse et octobasse).
Unes des fonctions du son et de l'électronique est de fabriquer de fausses pistes, de colorer les images enregistrées en leur donnant un "sens" différent chaque fois qu'elles réapparaissent. Ainsi, quand un fragment revient il nous apparaît à la fois "déjà vu" et à la fois transformé.
Une autre fonction du son, est d'exprimer les pensées des personnages surveillés à leur insu. Si on voit l'image de quelqu'un qui marche dans la rue et qu'en même temps il est sur scène se parlant à lui- même, on croit qu'en marchant il pense tout haut. Alors qu'on le voit directement sur scène dire ce même texte dans une tout autre situation que celle projetée à l'écran.
Quand aux phrases dites par une voix de synthèse, une voix impersonnelle constituée artificiellement par l'ordinateur, elles sembleront provenir de quelqu'un ou d'un appareil invisible qui surveille tout le monde en permanence.
C'est le dispositif scénique, visuel et sonore qui distribue les différents éléments. Pris dans ce panoptique ou dans ce tourbillon, le spectateur sera obligé de créer des superpositions, des mixages, son propre montage, c'est à dire d'être actif. Une partie de jeu-exercice, en balance permanente entre virtuel et réel.
Georges Aperghis
"Image d'une œuvre n°13", un reportage sur la création proposé par l'IRCAM
Pour découvrir le spectacle filmé par Arte liveweb lors de la création à Paris, c'est ICI
Monomanies
1991
sept mélodies pour voix de femme sur des poèmes français du XVI siècle
Durée : 10 minutes
Création : 21 février 1993 au Festival Présences, Radio France-Paris par Valérie Philippin.
Il s'agit de pièces pour voix seule écrites sur des poèmes français du XVIème siècle. Ces textes, choisis pour leur musicalité propre et pour leur expressivité, sonnent à nos oreilles comme des percussions vocales imaginaires.
A partir de ce matériau, j'ai essayé d'imaginer un contexte "mélodique", non pour édulcorer leur contenu, mais au contraire pour exacerber en faisant voyager une voix de syllabe en syllabe, fouillant leur propre musique ainsi que leur intelligence.
Georges Aperghis
Mouvement pour quintette
1975
pour violon, alto, violoncelle, clarinette et piano
Durée : 13 minutes
Création : 11 juillet 2003 au Festival de Cluny, Dominique Clément (cl), Noémie Schindler (vlon), Garth Knox (vla), Christophe Roy (vcelle), Alain Neveu (pno).
Cette courte pièce de la première période de Georges Aperghis, dédiée à Madame Salabert, présente déjà en elle toutes les caractéristiques futures du compositeur. Le traitement « vocal » des instruments (glissandi et sons saturés) sera présent dans les 280 mesures pour clarinette et dans les Récitations. Les blocs rythmiques par sections saccadées annoncent les matériaux des Simulacres et de Graffiti. L'originalité du théâtre instrumental met en rapport de conflit ou de complicité les instrumentistes qui façonnent l'histoire de la pièce.
Armand Angster
Obstinate
2017-2018
pour contrebasse
Durée : 7 minutes
Création : le 2 mai 2018, Philharmonie de Köln/Acht Brücken festival par Florentin Ginot
L’interprète s’attaque, entêté, obstiné, aux cordes d’une contrebasse. Et, plus encore qu’aux cordes, à la tension de ces cordes, qui refuse de lui céder. Il se bat contre elle sans désarmer, la travaille comme un sculpteur défie le marbre, avec des gestes répétés, furieux et inlassables.
Bref : tout est dans le titre.
Jérémie Szpirglas
Parcours
Musiques de Georges Aperghis adaptées et interprétées par Jean-Pierre Drouet sur les machines musicales de Claudine Brahem - Regardez Parcours sur le net
Environ 40 minutes
C’est à la suite des expositions de mes machines musicales qu’un désir s’est fait sentir de la part des visiteurs et des structures accueillantes :
ajouter au plaisir de manipuler ces machines celui de les voir et de les entendre dans leur utilisation professionnelle.
J’ai donc eu l’idée de créer un spectacle dans l’exposition, constitué de petites pièces de Georges Aperghis.
Plusieurs de ces pièces sont à l’origine de machines présentées.
Les autres ont été adaptées par Jean-Pierre Drouet pour les machines créées dans des contextes différents.
Claudine Brahem
Parcours est une pièce composite, constituée par des extraits de Conversations, Enumérations, Tour de Babel, et Eclipse partielle.
Dans chacune de ces pièces j’avais composé des séquences de théâtre musical pour les machines sonores imaginées et construites par Claudine Brahem, après un travail préliminaire avec elle. Le va-et-vient des idées amène à imaginer des objets sonores non seulement en fonction des sons qu’ils produisent mais aussi par rapport à leur aspect visuel et aux gestes qu’ils impliquent pendant leur utilisation.
Avec Jean-Pierre Drouet, vieux complice et compagnon de route, nous avons imaginé ce « Parcours », passage d’une machine sonore à l’autre, d’une séquence à une autre, sorte de jeu qui reflète les recoupements de nos travaux collectifs, de nos parcours.
Georges Aperghis
Tricycle - extrait "Eclipse Partielle"
Cello à caisse - extrait "Enumérations"
Porte des fantômes - extrait "Enumérations"
Charette de la promenade - extrait "Enumérations"
Baptême par l’eau et par le feu - extrait de "Conversations"
Machine à intempéries - extrait "Enumérations"
Waldfeutel - extrait de "Tour de Babel"
Polystyrène - extrait "Enumérations"
Cornet - extrait de "Tour de Babel"
Table d’énumérations - extrait"Enumérations"
Fontaine
Vièle - extrait de "Conversations"
Clacquoirs de bois - extrait de "Conversations"
Clacquoirs de métal - extrait de "Conversations"
Ses muscles - extrait de "Conversations"
Parlando
2009 - Pour Uli Fussenegger
pour contrebasse solo,
Durée : 17 minutes
Création : 19 juillet 2010, 45ème édition Internationale Ferienkurse für Neue Musik Darmstadt, Orangerie, Uli Fussenegger.
Parlando veut dire : la contrebasse parle. Cette pièce écrite sur mesure montre à quel point Aperghis veut explorer à chaque fois avec gourmandise les extrêmes de chaque instrument. Il développe en même temps les possibilités spécifiques d’une sorte de narration musicale : un discours plein de répétitions, de nouveaux départs et d’interruptions qui fait du sur place - ou qui tourne autour d’un lieu défini par des intervalles très resserrés - en une langue faites d’incertitudes tapageuses, d’interactions nerveuses, d’imprécations (allant jusqu’aux gémissements). La partition est souvent notée sur deux portées, ce qui indique quelles sont les exigences énormes du compositeur face à l’interprète. Mis à part notre surprise de voir jusqu’à quels registres élevés la basse peut monter, l’œuvre demande aussi des alternances complexes des modes de jeu et elle utilise la technique du tapping, connue surtout dans le jazz, d’une façon qui réintègre le groove dans la musique contemporaine.
Patrick Hahn
CD Kairos 13222 - 2012 - Donatienne Michel-Dansac, Uli Fussenegger, Klangforum Wien, Emilio Pomarico . Sylvain Cambreling
Passwords
2016, Pour les Neue Vocalsolisten Stuttgart
pour 6 chanteurs (soprano colorature, soprano, mezzo-soprano, ténor baryton, basse)
Durée : 12 minutes
Création : le 3 novembre 2017, festival G((o))ng Tomorrow, Copenhague par les Neuevocalsolisten Stuttgart - Johanna Zimmer, Susanne Leitz-Lorey, Truike van der Poel, Martin Nagy, Guillermo Anzorena, Andreas Fischer
Le mot de passe était d’abord utilisé par les militaires pour s’identifier aux frontières.
Aujourd’hui nous sommes envahis par les mots de passe et identifiants dans notre vie quotidienne, nous créons des amalgames de mots et chiffres pour nous sécuriser.
Les mots utilisés sont ici dénués de leur sens originel et l’agencement de ceux-ci entre eux créent une syntaxe inhabituelle, une sorte de polyphonies de sens qui ne veulent rien dire.
C’est à cet exercice que s’adonnent les 6 chanteurs de la pièce, tentant d’apprivoiser les changements de combinaisons qui s’opèrent.
Georges Aperghis
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Paysage sous surveillance (d'après le texte d'Heiner Müller)
1991
pour 2 acteurs ensemble et électronique
Spectacle d'une heure
Création au Kaaitheater de Bruxelles les 25 et 26 octobre 2002 par l'ensemble Ictus dirigé par Georges-Elie Octors avec Johanne Saunier et Jos Houben - Scénographie et lumières Peter Missotten - Vidéo Kurt d'Haeseleer.
Monde policier, paysage électronique, meurtres virtuels, spectres sous surveillance, leçons de perspective : voilà les motifs de cette partition dont la musique devrait irriguer les représentations multiples. La forme du spectacle, en spirale, fera naviguer le spectateur dans un univers d'apocalypse comique, lui rapellant combien "notre monde" est devenu irrépresentable : seule l'énergie musicale qui traversera les corps des interprètes (musiciens-acteurs) pourra lui insuffler une vie furtive, lui donner un visage.
Georges Aperghis
Bande annonce du spectacle sur le web et plus d'images sur la page d'Ictus
Pièce pour douze
1991
pour 2 hautbois, clarinette contrebasse, contrebasson, 2 cors, tuba, piano, 2 marimbas, contrebasse
Durée : 13 minutes
Création : 11 avril 1991, Paris-Centre Pompidou, ensemble Intercontemporain, Peter Eötvös (dir).
Pièce pour douze : douze instruments dont le registre dominant est le grave, voire l'extrême grave.
L'oeuvre est conçue comme une suite d'échappées avortées, qui retombent chaque fois dans une rumeur profonde, à la limite de l'imperceptible : autant de cycles qui scandent la forme.
Une rumeur incessante et instable : « comme la flamme d'une bougie », elle vacille. Car le son, si infime soit-il, est toujours perturbé, par des ornements en quarts de ton, par des sons multiples aux bois, par la voix des instrumentistes qui chantent dans les cuivres (1), par l'alternance rapide des timbres ouverts ou bouchés aux cors. (Ce murmure est comme le ressassement d'une cellule de six notes, qui imprègne les figures musicales de toute la pièce).
Un premier envol se termine par une chute des cors et du tuba - figure de l'échec qui reviendra plusieurs fois. Le tuba reste seul, dans l'abattement de l'extrême-grave, « morendo ».
Un second accroissement d'énergie - gonflement de l'effectif, éclatement des registres et des rythmes - se solde par une rechute : deux cors lointains, permutant inlassablement et comme en écho les mêmes motifs. Cette « cadence » à deux conduit à une réexposition des premières mesures.
La texture initiale, qui semblait liminale, est alors déchirée, clairsemée : la raréfaction, l'entropie sont à leur maximum. Des silences - les premiers de la pièce - trouent le tissu sonore, qui devient pourtant la proie d'une agitation croissante. Les cycles se resserrent, l'instabilité atteint la succession des phrases. Le discours devient heurté, les alternances chaotiques : l'oeuvre se termine à la façon d'une strette.
Avec Pièce pour douze, Georges Aperghis a écrit une oeuvre de « musique pure », distincte de sa production pour le théâtre. S'il subsiste néanmoins une certaine théâtralité, elle est toute intérieure - issue de la construction dramatique de la grande forme.
Peter Szendy
(1) la voix n'est jamais perçue comme telle : elle se fond en un son complexe instrumental
Presto
2003
pour 2 voix
Création : le 22 juillet 1983 par Martine Viard (Soprano) et Edith Scob (Comédienne au Festival d'Avignon
Ce texte de cinq pages écrit verticalement peut aussi se lire horizontalement.
Tout est possible-
jeu avec les mots-
jeu de sens-
jeu de rythmes mais en respectant le « presto » du titre.
A bout de souffle
en bouche-
en bouche-
Seule ?
à deux ?
les gestes essayant de rattraper la voix – le chanter - le parler – le dialogue – le courir – le dé « composer ».
Georges Aperghis
Print Music
2002 - Pour Vincent Leterme
pour piano seul
Durée 17 minutes
Création : le 25 septembre 2002 au Festival Musica à Strasbourg, par Vincent Leterme
Le papier offre l'agrément de la répétition. Un motif succède à un autre, sans pour autant le développer ; sur ce rien naît un rythme, réduit à son écorce. Que reste t-il d'une harmonie échappée de son contexte, de squelettes familiers, tel accord, telle cadence, sortis de leur contexte originel et débarrassés de leur épaisseur initiale et sentimentale ?
Une nouvelle et étrange beauté joue de la répétition comme de la mémoire. Aucune catharsis dans ce procédé, aucun aboutissement ultime, ni pour l'auditeur, ni pour l'interprète : c'est Schubert plutôt que Beethoven, qui pouvait si bien tourner en rond. Plutôt qu'un art de la peinture et de la profondeur, il s'agit ici d'un art de la décoration et de ses bienfaits.
Georges Aperghis
Profils
2001 - pour Françoise Rivalland et Sonia Wieder-Atherton
pour zarb et violoncelle
Durée : 15 minutes
Création : le 21 juillet 2001 au Théâtre du Jeu de Paume à Aix en Provence par Françoise Rivalland et Sonia Wieder-Atherton.
On ne saura rien du drame que semblent énoncer le violoncelle et le zarb des Profils de Georges Aperghis, rien sinon la menace qui filtre de leurs effleurements furtifs et de la violence de leurs affolements. Mais on retiendra l'étrange fascination qui naît du jeu cruel qu'ils se livrent et la puissance libératoire de forces puisées au plus secret d'elles-mêmes par les deux dédicataires de la pièce.
Françoise Malettra
« …comme en musique indienne, se suivre, se perdre, se retrouver… ce serait deux femmes qui parleraient du bassin méditerranéen sans y avoir jamais été… un drame si présent que l’on n’en parle pas, on l’effleure parfois seulement à la fin… »
Georges Aperghis
En Sonate, CD BMG France/RCA red Seal n°82876552732 (2003)
Pubs - Reklamen
2000-2015
Cycle pour soprano solo chanté par Valérie Philippin et Donatienne Michel-Dansac
Durée : 20 minutes
1 Corn flakes
2 Detergent
3 Tooth paste
4 Soft drinks
5 Hydrating cream
6 Video game
7 Shampoo
Il s’agit de la création du premier cahier de réclames (7). Que dans notre vie quotidienne nous soyons entourés d’images et de sons, d’annonces qui nous proposent de combler nos désirs pour plus de bonheur et de confort mais aussi pour créer des désirs que nous n’avons pas encore, c’est une évidence.
Ainsi chaque réclame met en valeur un produit différent (dentifrice, vitamines, boissons, shampoing etc).
Ces pièces se proposent de transposer les contenus de chaque réclame grâce à un traitement vocal spécifique qui créent une tension entre les textes publicitaires et le rendu musical. Elles sont un prétexte pour me permettre de continuer à explorer la voix.
Georges Aperghis
Pour découvrir ces pièces brèves, il suffit de suivre le lien vers l'émission de la journaliste Anne Montaron Alla Breve
Quatre pièces fébriles
1995
pour piano et marimba
Durée : 17 minutes
Création : 1996, Théâtre du renard à Paris, Françoise Rivalland (marimba) et Vincent Leterme (pno).
Les Pièces fébriles sont des jeux de miroirs entre le piano et le marimba, des jeux de résonances - ou des jeux entre les attaques sèches et leur résonance. Des jeux où l'on se perd, ne sachant plus qui est qui - ou quoi est quoi.
Georges Aperghis
1981
pour 3 percussions. À Jean-Pierre Drouet, Gaston Sylvestre et Willy Coquillat. Regardez Les guetteurs de sons sur le net, trio We Spoke
Création en juin 1981, Festival de Saint-Denis, Théâtre Gérard Philippe, par le trio le Cercle (J.P Drouet, G. Sylvestre, W. Coquillat).
Le silence, Les sons Dans la tête. Au dehors.
Trois musiciens côte à côte.
Trois individus, ou trois versions du même ?
Instruments identiques pour les trois.
Instruments qui jouent parfois tout seuls, malgré la volonté des interprètes pour leur plus vif étonnement, ou qui servent à modeler des sons comme si ceux-ci étaient palpables.
Le mécanisme est ici monté : silence - volonté de produire un son - transmission aux bras, aux mains, aux doigts.
Production du son - écoute.
Les mains des percussionnistes travaillent parfois indépendamment de leurs corps. Eux-mêmes en sont surpris.
Tout ceci donne lieu à des petites séquences tendres et comiques pendant lesquelles des connivences se créent entre les trois musiciens qui modèlent les sons pour lutter contre le silence.
Qui aura le dernier mot ?
Georges Aperghis
Happy End
2007 - Pour l'ensemble Ictus
pour ensemble et électronique
Texte bilingue français/anglais avec les voix d'Edith Scob et Michael Lonsdale - d'après "Le petit poucet" de Charles Perrault
Durée approximative : 1 heure
Création : le 7 décembre 2007, Opéra de Lille, ensemble Ictus, Georges-Elie Octors (dir), Sébastien Roux (RIM IRCAM), film d'animation Hans op de Beeck, Bruno Hardt et Klaas Verpoest.
Né en 1969, Hans Op de Beeck s'est signalé par d'énormes installations à échelle réelle représentant des sites ubains imaginaires, ainsi que des installations vidéos, des dessins, des films d'animation. Son univers est imprégné d’une douce désolation, d’une solitude ironique. Non pas dénonciation révoltée d’un monde féroce, mais exploration calme d’un univers où c’est déjà trop tard : tous autant que nous sommes, nous y sommes en exil, décentrés, consentants, en attente d’un événement qui ne surviendra pas. En collaboration avec Bruno Hardt et Klaas Verpoest, Op de Beeck a conçu pour "Happy End" un film d'animation au ryhme lent - une errance illimitée dans de vastes cités imaginaires. A cette longue dérive répond la musique d'Aperghis, motorique, inarrêtable, et saturée d'ambigüité : elle semble toujours combinaison vacillante de deux ou trois sources musicales différentes, équarries dans une grille rythmique dessinée au rasoir.
Les voix de Michael Lonsdale et Edith Scob, enfin, travaillées avec Sébastien Roux (à l'IRCAM, toujours), en une stupéfiante partition électronique qui tient du manga, du dessin animé et du jeu vidéo, racontent l'histoire du Petit Poucet - la perte et l'errance, mais aussi la ruse et le courage de celui qui a tout perdu. (JL Plouvier)
La perte de traces, la mémoire altérée, les repères disparus au sein de "mixages" inédits, les codes changés, méconnaissables, les notes émiettées qui s'envolent, le chapelet mélodique dispersé, les mots vides de sens, l'amnésie et l'angoisse qui s'en suit, les efforts de se souvenir, de retrouver un sens, une route, la peur d'être "seul" à jamais, au milieu des foules, des cités gigantesques... Essayer de retrouver ce que jadis étaient la « musique », le « verbe », les « gestes quotidiens ». (G.A.)
Bande-annonce disponible sur Vimeo.
Sur le site de l'ensemble ictus, retrouvez plus de détails
Histoire de loups
1976
Opéra pour 8 voix solistes, 4 barytons et 9 musiciens
Création les 26, 27, 29, 30 et 31 juillet 1976 au Cloître des Célestins - XXXè Festival d'Avignon. Reprise Atelier lyrique du Rhin le 10 mars 1977.
Musique : Georges Aperghis | Texte : Marie-Noëlle Rio (d'après S. Freud) | Direction musicale : Yves Prin | Dramaturgie et mise en scène : Pierre Barrat | Scénographie : Yannis Kokkos | Eclairages : Alain Banville | Assistant décorateur : François Hoang
en coproduction avec l'Atelier Lyrique du Rhin
VOIR LA PAGE DEDIEE A CET OPERA sur ce site.
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Il Gigante Golia
1975
pour soprano et 16 musiciens
d'après un motet sarde
Durée : 10 minutes
Création : 15 septembre 1975, Biennale di Venezia, Elise Ross (sop), ensemble Anton Webern, Marcello Pani (dir).
Il s'agit de « Variations d'humeur » où la chanteuse se retrouve, pour ainsi dire, au milieu de l'arène.
Il Gigante Golia est un dialogue entre la soprano et l'orchestre dont le sujet est tiré de la célébration en Sardaigne de la légende de la mort du géant Goliath, avec des références aux champs populaires sardes et aux effets aussi « étranges » que ceux d'une chasse, une émeute ou le passage d'une fanfare de village.
Georges Aperghis
In Extremis
1998
pour 8 musiciens (1.0.0.0-1.0.0.1, perc, pno, str. (0.0.1.1.1))
Durée : 15 minutes
Création le 4 février 1999, Poitiers, Conservatoire National de Région, Ensemble Ars Nova, Philippe Nahon (dir)
In extremis, sorte de concerto grosso, oppose des vents difficiles à apparier (flûte, cor, tuba) à un trio de cordes (alto, violoncelle, contrebasse) tiré vers le grave, le piano et la percussion participant de leur côté à un processus conflictuel. L'instrumentarium insolite n'est pas la seule justification du titre. Les données de la composition, présentes d'emblée dans l'agitation contenue de l'introduction, ne se dévoilent que progressivement et n'atteignent à une totale clarté qu'in extremis, dans le dialogue de sourds entre un tuba colérique et un piano rasséréné. Chemin faisant, chaque soliste tour à tour aura fait assaut de véhémence joyeuse ou de calme affiché.
Intermezzi
2015-2016, 2020 - Pour Musikfabrik
pour 16 musiciens (1.1.1.1-1.1.1.1, perc, 2 pno, str. (1.1.1.1.1))
Durée : 1 heure
Création le 21 septembre 2020, Philarmonie de Cologne par l'Ensemble Musikfabrik
commissioned by Ensemble Musikfabrik, musica viva of Bayerischer Rundfunk and sponsored by Kunststiftung NRW
Intermezzi de Georges Aperghis, œuvre pour ensemble non dirigé, est la rencontre et la collision entre le compositeur et les 16 musiciens de l’ensemble Musikfabrik, dédicataire de l’œuvre.
Développant une musique puissante, théâtrale, vocale, telle un « grand corps qui respire », la pièce se construit en intermèdes qui se chevauchent, se coupent et s’élancent formellement, ouvrant et fermant des portes musicales. Le corps du musicien est une matière organique modelée et projetée scéniquement dans son entièreté. L’existence de chacun est éprouvée au sein du groupe, par moments tel un discours solitaire, cri du corps retiré de sa masse.
« Pour trouver mon énergie je profite du fait de savoir que vous allez relayer cette énergie. Je suis à l’affut des coïncidences, ce qui m’intéresse le plus est la rencontre entre mes problèmes et ce qui m’est proposé. »
Composée pour l’ensemble Musikfabrik, Intermezzi en exploite toute la diversité : du jeu solo à la musique de chambre, maniant tantôt la voix, tantôt les instruments à double-pavillons…
« Ces choses reviennent dans des positions différentes, comme un carrousel qui tourne : le public les découvre chaque fois dans une syntaxe différente. »
Intermezzi est une œuvre forte, un tournant pour Georges Aperghis tel qu’il le définit lui-même : « Cette manière d’avoir une grande amitié musicale pour chacun de vous me pousse à faire une pièce qui ne serait pas la même s’il n’y avait pas ce processus là. Intermezzi, c’est une pièce qui m’étonne moi-même, son processus me surprend. »
La pièce se développe comme un self-portrait de Musikfabrik, que Georges Aperghis façonne par l’utilisation de chaque membre dans sa plus grande altérité. Cette création si particulière, œuvre décapante, drôle, extravagante, curieuse, effrénée est unique pour l’ensemble, tel un « statement » scénique.
Les citations sont tirées d’une interview réalisée en mars 2016 avec Georges Aperghis.
Jactations
2001 - A Lionel Peintre
pour baryton seul
Durée : 30 minutes
Création : 2002, Festival Musica-Strasbourg par Lionel Peintre.
« Jactations : agitations désordonnées qui s'observent dans certains troubles nerveux liés à l'anxiété. »
Après Quatorze Récitations, Georges Aperghis confie à la voix de baryton un théâtre vocal, plein d'éructations, d'infirmités, d'éclats. La pathologie est virtuose ! Contre tout esthétisme, cette minutieuse observation éclaire les différents états humains : une pensée n'en remplace pas une autre, une attitude ne triomphe pas d'une posture antérieure mais s'y juxtapose, tout aussi impérieuse et grotesque.
CD Tingel Tangel — Jactations, Vand’œuvre Réf. 0426/Distribution Muséa, Metamkine, les Allumés du jazz, Improjazz
Kryptogramma
1970
pour 6 percussionnistes
Durée : 17 minutes
Création : 12 juillet 1972 au Festival au Marais à Paris par les Percussions de Strasbourg.
Kryptogramma : ce qui est écrit en caractères secrets, en code, en langage chiffré. En effet, cette œuvre est construite à partir de rythmes empruntés aux chefs d’œuvre classiques qui se trouvent « codifiés », de telle sorte qu’ils deviennent indéchiffrables. Au début de la partition, un certain nombre de rythmes simples sont exposés puis, sur leurs développements, s’amorcent, d’une part un canevas de mouvements ascendants, d’autre part de grandes fluctuations de densités. A partir de ce moment, l’œuvre se développe par une série de variations (continues ou entrecoupées) sur les relations des intervalles et des rythmes découlant des mouvements ascendants.
Georges Aperghis
Les lauriers sont coupés
1975 - A Charles Ravier
pour soprano, mezzo-soprano, flûte, hautbois/cor anglais, basson, trombone et alto
Durée : 20 minutes
Création : 29 juillet 1975 au festival d'Avignon par l'Ensemble Polyphonique de Paris dirigé par Charles Ravier, Véronique Dietschy (Soprano) et Amelia Salvetti (Mezzo-Soprano).
...le corps des interprètes (musiciens, acteurs, chanteurs, etc.) tend à s'émanciper, à signifier, à raconter, en plus de sa pratique spécifique. L'expression vocale s'est diversifiée à l'extrême et n'est plus l'attribut des seuls chanteurs. A travers toutes ces pulvérisations dynamisantes, nous nous trouvons devant une polyphonie possible, constituée par plusieurs microlangages, capables de créer une énergie physique et émotive en provoquant des confrontations violentes entre le sens d'une image ou d'un son et une signification purement formelle.
Georges Aperghis
Liebestod
1987
pour récitante, 8 chanteurs et 9 musiciens
Texte de Bettina Van Arnim
Durée: 145 minutes
Création : 1987 au Théâtre National de Chaillot, Orchestre Philharmonique de Paris, Yves Prin (dir)
Une partie du livret est lisible en ligne ICI.
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
La Nuit en tête
2000
pour violon, violoncelle, flûte, clarinette, piano percussion et soprano
Durée :14 minutes
Créé le 16 décembre 2000 au Festival Présences Radio France-Paris par l'ensemble S:i.c avec Donatienne Michel-Dansac (sop)
« Les rumeurs de la nuit de carnaval s'éteignent, le carillon de la tour sonne six heures » nous dit Schumann. La Nuit en tête devait être un «nocturne», non pas nuit mais appréciation personnelle de la nuit, en tête ou entêtée, à la tête de ou dans la tête, image multiple et inattendue, un peu à la Char, fuyante encore dès que le compositeur tente d'en saisir l'idée. « Le projet était d'écrire cinq ou six mouvements brefs se développant indépendamment puis de les laisser s'enchevêtrer les uns dans les autres, l'oreille ne devant plus différencier les couleurs distinctives de chacun ».
La nuit en tête :sans doute faut-il entendre ce titre, non pas comme la transcription a posteriori d'une nuit imaginaire, programmée et calculée de tête dans ses effets, mais plutôt comme la nomination étonnée de ce qui s'est écrit, là, en tâtonnant du bout des doigts et depuis le corps à corps de l'écriture, dans un entêtement qui n'a rien à voir avec un volontarisme conscient. Il faut l'entendre au sens où l'on dit aussi d'une mélodie qu'elle est entêtante, ou entêtée : insistante, obsédante, comme une douleur lancinante dans le corps.
La nuit en tête, ce sont, selon les mots de Georges Aperghis1 ,des « agglomérats de sensations » : « jeux d'enfants », « processions nocturnes », « états d'âme furtifs ». Et ces agglomérats sont mobiles (« comme des sables mouvants »), portés par une harmonie elle-même « glissante » entre des « accords connus » et des quarts-de-ton qui lui confèrent d'étranges irisations2 . C'est, dit-il encore, l'inscription d'une intense « énergie », d'une « trépidation permanente, mais comme étouffée dans l'obscurité ».
Peter Szendy
1-Toutes les citations qui suivent, entre guillemets, renvoient à ses mots, notés à la hâte au cours d'une conversation le 22 janvier 2002.
2-De fait, ce sont pour lui les microintervalles qui fabriquent la luminosité - aussi faiblement nocturne soit-elle -, tandis que les accords identifiables restent « opaques »
Musique(s) de chambre: 5 pièces pour espérou et violoncelle . Faux mouvement . Les secrets élémentaires . Requiem furtif . La nuit en tête, CD Zig Zag Territoires ZZT 020501 - Ensemble S:i.c.
Luna Park
2011
Une heure.
Textes de G.Aperghis et François Regnault.
Spectacle pour 2 flûtes, un percussionniste, une actrice et électronique.
Création le 8 juin 2011 à l'Espace de projection de l'IRCAM dans le cadre du festival Manifeste. Avec Eva Fürrer, Johanne Saunier, Richard Dubelski et Mike Schmid. Musique et mise en scène de Georges Aperghis, Lumières/Installation/Vidéo Daniel Lévy,
Commande IRCAM-Centre Pompidou et du festival International de Musique Contemporaine Automne de Varsovie.
Comment réussir à voir sans être vu ?
Comment surveiller ses voisins chez eux, dans la rue, dans leur vie de tous les jours en restant derrière un écran ?
Dans Luna Park, chacun surveille l'autre.
Les 4 interprètes, placés côte à côte, n'ont entre eux que des contacts virtuels, jamais physiques ni directs, obligés de passer par le "circuit" : micros, caméras de surveillance, écrans, hauts parleurs espions.
Chacun se regarde dans sa caméra comme dans un puits profond, entretient un rapport presque amoureux avec elle et aussi avec sa propre image.
Une tentative d'auto-surveillance ?
Comme le raconte Thomas Bernhard dans son texte "Marcher", il est pourtant absolument impossible de se surveiller soi-même; le fait de savoir que l'on se surveille fait que l'on change d'attitude, on s'échappe, on devient quelqu'un d'autre.
Dans cette machinerie technologique, quelle est la place du corps ? Quelle est sa fonction ? Comment réagit-il aux machines qui s'emballent ? Est ce qu'il ne devient pas uniquement "oeil" et "oreille" ?
Ainsi, les interprètes deviennent eux-mêmes caméras, eux-mêmes micros; ils se mettent à parler à leur place, détaillant ce qu'ils voient, racontant des petites histoires vues, surveillées, filmées, avec des mots mais aussi avec des chiffres (time-code, mesure du passage du temps pendant une séquence).
En fonction de l'image projetée et de ce qui se passe sur scène, il y aura des jeux de proximité, des superpositions, des mixages.
Cela peut être alors drôle ou angoissant comme un manège de Luna Park.
Le dispositif de Luna Park s'apparente à un retable où les deux figures verticales (les flûtistes Eva Furrer et Mike Schmid) encadrent deux figures "assises" (Johanne Saunier et Richard Dubelski, dont le geste sera "suivi" par les capteurs du mouvement).
Les polyphonies musicales sont construites à partir de fragments de phrases, de mots, des phonèmes, de chiffres. Déconstruction et reconstruction de ce que les autres ont dit. Les souffles, les respirations sont prolongées par les instruments (flûte basse et octobasse).
Unes des fonctions du son et de l'électronique est de fabriquer de fausses pistes, de colorer les images enregistrées en leur donnant un "sens" différent chaque fois qu'elles réapparaissent. Ainsi, quand un fragment revient il nous apparaît à la fois "déjà vu" et à la fois transformé.
Une autre fonction du son, est d'exprimer les pensées des personnages surveillés à leur insu. Si on voit l'image de quelqu'un qui marche dans la rue et qu'en même temps il est sur scène se parlant à lui- même, on croit qu'en marchant il pense tout haut. Alors qu'on le voit directement sur scène dire ce même texte dans une tout autre situation que celle projetée à l'écran.
Quand aux phrases dites par une voix de synthèse, une voix impersonnelle constituée artificiellement par l'ordinateur, elles sembleront provenir de quelqu'un ou d'un appareil invisible qui surveille tout le monde en permanence.
C'est le dispositif scénique, visuel et sonore qui distribue les différents éléments. Pris dans ce panoptique ou dans ce tourbillon, le spectateur sera obligé de créer des superpositions, des mixages, son propre montage, c'est à dire d'être actif. Une partie de jeu-exercice, en balance permanente entre virtuel et réel.
Georges Aperghis
"Image d'une œuvre n°13", un reportage sur la création proposé par l'IRCAM
Pour découvrir le spectacle filmé par Arte liveweb lors de la création à Paris, c'est ICI
Monomanies
1991
sept mélodies pour voix de femme sur des poèmes français du XVI siècle
Durée : 10 minutes
Création : 21 février 1993 au Festival Présences, Radio France-Paris par Valérie Philippin.
Il s'agit de pièces pour voix seule écrites sur des poèmes français du XVIème siècle. Ces textes, choisis pour leur musicalité propre et pour leur expressivité, sonnent à nos oreilles comme des percussions vocales imaginaires.
A partir de ce matériau, j'ai essayé d'imaginer un contexte "mélodique", non pour édulcorer leur contenu, mais au contraire pour exacerber en faisant voyager une voix de syllabe en syllabe, fouillant leur propre musique ainsi que leur intelligence.
Georges Aperghis
Mouvement pour quintette
1975
pour violon, alto, violoncelle, clarinette et piano
Durée : 13 minutes
Création : 11 juillet 2003 au Festival de Cluny, Dominique Clément (cl), Noémie Schindler (vlon), Garth Knox (vla), Christophe Roy (vcelle), Alain Neveu (pno).
Cette courte pièce de la première période de Georges Aperghis, dédiée à Madame Salabert, présente déjà en elle toutes les caractéristiques futures du compositeur. Le traitement « vocal » des instruments (glissandi et sons saturés) sera présent dans les 280 mesures pour clarinette et dans les Récitations. Les blocs rythmiques par sections saccadées annoncent les matériaux des Simulacres et de Graffiti. L'originalité du théâtre instrumental met en rapport de conflit ou de complicité les instrumentistes qui façonnent l'histoire de la pièce.
Armand Angster
Obstinate
2017-2018
pour contrebasse
Durée : 7 minutes
Création : le 2 mai 2018, Philharmonie de Köln/Acht Brücken festival par Florentin Ginot
L’interprète s’attaque, entêté, obstiné, aux cordes d’une contrebasse. Et, plus encore qu’aux cordes, à la tension de ces cordes, qui refuse de lui céder. Il se bat contre elle sans désarmer, la travaille comme un sculpteur défie le marbre, avec des gestes répétés, furieux et inlassables.
Bref : tout est dans le titre.
Jérémie Szpirglas
Parcours
Musiques de Georges Aperghis adaptées et interprétées par Jean-Pierre Drouet sur les machines musicales de Claudine Brahem - Regardez Parcours sur le net
Environ 40 minutes
C’est à la suite des expositions de mes machines musicales qu’un désir s’est fait sentir de la part des visiteurs et des structures accueillantes :
ajouter au plaisir de manipuler ces machines celui de les voir et de les entendre dans leur utilisation professionnelle.
J’ai donc eu l’idée de créer un spectacle dans l’exposition, constitué de petites pièces de Georges Aperghis.
Plusieurs de ces pièces sont à l’origine de machines présentées.
Les autres ont été adaptées par Jean-Pierre Drouet pour les machines créées dans des contextes différents.
Claudine Brahem
Parcours est une pièce composite, constituée par des extraits de Conversations, Enumérations, Tour de Babel, et Eclipse partielle.
Dans chacune de ces pièces j’avais composé des séquences de théâtre musical pour les machines sonores imaginées et construites par Claudine Brahem, après un travail préliminaire avec elle. Le va-et-vient des idées amène à imaginer des objets sonores non seulement en fonction des sons qu’ils produisent mais aussi par rapport à leur aspect visuel et aux gestes qu’ils impliquent pendant leur utilisation.
Avec Jean-Pierre Drouet, vieux complice et compagnon de route, nous avons imaginé ce « Parcours », passage d’une machine sonore à l’autre, d’une séquence à une autre, sorte de jeu qui reflète les recoupements de nos travaux collectifs, de nos parcours.
Georges Aperghis
Tricycle - extrait "Eclipse Partielle"
Cello à caisse - extrait "Enumérations"
Porte des fantômes - extrait "Enumérations"
Charette de la promenade - extrait "Enumérations"
Baptême par l’eau et par le feu - extrait de "Conversations"
Machine à intempéries - extrait "Enumérations"
Waldfeutel - extrait de "Tour de Babel"
Polystyrène - extrait "Enumérations"
Cornet - extrait de "Tour de Babel"
Table d’énumérations - extrait"Enumérations"
Fontaine
Vièle - extrait de "Conversations"
Clacquoirs de bois - extrait de "Conversations"
Clacquoirs de métal - extrait de "Conversations"
Ses muscles - extrait de "Conversations"
Parlando
2009 - Pour Uli Fussenegger
pour contrebasse solo,
Durée : 17 minutes
Création : 19 juillet 2010, 45ème édition Internationale Ferienkurse für Neue Musik Darmstadt, Orangerie, Uli Fussenegger.
Parlando veut dire : la contrebasse parle. Cette pièce écrite sur mesure montre à quel point Aperghis veut explorer à chaque fois avec gourmandise les extrêmes de chaque instrument. Il développe en même temps les possibilités spécifiques d’une sorte de narration musicale : un discours plein de répétitions, de nouveaux départs et d’interruptions qui fait du sur place - ou qui tourne autour d’un lieu défini par des intervalles très resserrés - en une langue faites d’incertitudes tapageuses, d’interactions nerveuses, d’imprécations (allant jusqu’aux gémissements). La partition est souvent notée sur deux portées, ce qui indique quelles sont les exigences énormes du compositeur face à l’interprète. Mis à part notre surprise de voir jusqu’à quels registres élevés la basse peut monter, l’œuvre demande aussi des alternances complexes des modes de jeu et elle utilise la technique du tapping, connue surtout dans le jazz, d’une façon qui réintègre le groove dans la musique contemporaine.
Patrick Hahn
CD Kairos 13222 - 2012 - Donatienne Michel-Dansac, Uli Fussenegger, Klangforum Wien, Emilio Pomarico . Sylvain Cambreling
Passwords
2016, Pour les Neue Vocalsolisten Stuttgart
pour 6 chanteurs (soprano colorature, soprano, mezzo-soprano, ténor baryton, basse)
Durée : 12 minutes
Création : le 3 novembre 2017, festival G((o))ng Tomorrow, Copenhague par les Neuevocalsolisten Stuttgart - Johanna Zimmer, Susanne Leitz-Lorey, Truike van der Poel, Martin Nagy, Guillermo Anzorena, Andreas Fischer
Le mot de passe était d’abord utilisé par les militaires pour s’identifier aux frontières.
Aujourd’hui nous sommes envahis par les mots de passe et identifiants dans notre vie quotidienne, nous créons des amalgames de mots et chiffres pour nous sécuriser.
Les mots utilisés sont ici dénués de leur sens originel et l’agencement de ceux-ci entre eux créent une syntaxe inhabituelle, une sorte de polyphonies de sens qui ne veulent rien dire.
C’est à cet exercice que s’adonnent les 6 chanteurs de la pièce, tentant d’apprivoiser les changements de combinaisons qui s’opèrent.
Georges Aperghis
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Paysage sous surveillance (d'après le texte d'Heiner Müller)
1991
pour 2 acteurs ensemble et électronique
Spectacle d'une heure
Création au Kaaitheater de Bruxelles les 25 et 26 octobre 2002 par l'ensemble Ictus dirigé par Georges-Elie Octors avec Johanne Saunier et Jos Houben - Scénographie et lumières Peter Missotten - Vidéo Kurt d'Haeseleer.
Monde policier, paysage électronique, meurtres virtuels, spectres sous surveillance, leçons de perspective : voilà les motifs de cette partition dont la musique devrait irriguer les représentations multiples. La forme du spectacle, en spirale, fera naviguer le spectateur dans un univers d'apocalypse comique, lui rapellant combien "notre monde" est devenu irrépresentable : seule l'énergie musicale qui traversera les corps des interprètes (musiciens-acteurs) pourra lui insuffler une vie furtive, lui donner un visage.
Georges Aperghis
Bande annonce du spectacle sur le web et plus d'images sur la page d'Ictus
Pièce pour douze
1991
pour 2 hautbois, clarinette contrebasse, contrebasson, 2 cors, tuba, piano, 2 marimbas, contrebasse
Durée : 13 minutes
Création : 11 avril 1991, Paris-Centre Pompidou, ensemble Intercontemporain, Peter Eötvös (dir).
Pièce pour douze : douze instruments dont le registre dominant est le grave, voire l'extrême grave.
L'oeuvre est conçue comme une suite d'échappées avortées, qui retombent chaque fois dans une rumeur profonde, à la limite de l'imperceptible : autant de cycles qui scandent la forme.
Une rumeur incessante et instable : « comme la flamme d'une bougie », elle vacille. Car le son, si infime soit-il, est toujours perturbé, par des ornements en quarts de ton, par des sons multiples aux bois, par la voix des instrumentistes qui chantent dans les cuivres (1), par l'alternance rapide des timbres ouverts ou bouchés aux cors. (Ce murmure est comme le ressassement d'une cellule de six notes, qui imprègne les figures musicales de toute la pièce).
Un premier envol se termine par une chute des cors et du tuba - figure de l'échec qui reviendra plusieurs fois. Le tuba reste seul, dans l'abattement de l'extrême-grave, « morendo ».
Un second accroissement d'énergie - gonflement de l'effectif, éclatement des registres et des rythmes - se solde par une rechute : deux cors lointains, permutant inlassablement et comme en écho les mêmes motifs. Cette « cadence » à deux conduit à une réexposition des premières mesures.
La texture initiale, qui semblait liminale, est alors déchirée, clairsemée : la raréfaction, l'entropie sont à leur maximum. Des silences - les premiers de la pièce - trouent le tissu sonore, qui devient pourtant la proie d'une agitation croissante. Les cycles se resserrent, l'instabilité atteint la succession des phrases. Le discours devient heurté, les alternances chaotiques : l'oeuvre se termine à la façon d'une strette.
Avec Pièce pour douze, Georges Aperghis a écrit une oeuvre de « musique pure », distincte de sa production pour le théâtre. S'il subsiste néanmoins une certaine théâtralité, elle est toute intérieure - issue de la construction dramatique de la grande forme.
Peter Szendy
(1) la voix n'est jamais perçue comme telle : elle se fond en un son complexe instrumental
Presto
2003
pour 2 voix
Création : le 22 juillet 1983 par Martine Viard (Soprano) et Edith Scob (Comédienne au Festival d'Avignon
Ce texte de cinq pages écrit verticalement peut aussi se lire horizontalement.
Tout est possible-
jeu avec les mots-
jeu de sens-
jeu de rythmes mais en respectant le « presto » du titre.
A bout de souffle
en bouche-
en bouche-
Seule ?
à deux ?
les gestes essayant de rattraper la voix – le chanter - le parler – le dialogue – le courir – le dé « composer ».
Georges Aperghis
Print Music
2002 - Pour Vincent Leterme
pour piano seul
Durée 17 minutes
Création : le 25 septembre 2002 au Festival Musica à Strasbourg, par Vincent Leterme
Le papier offre l'agrément de la répétition. Un motif succède à un autre, sans pour autant le développer ; sur ce rien naît un rythme, réduit à son écorce. Que reste t-il d'une harmonie échappée de son contexte, de squelettes familiers, tel accord, telle cadence, sortis de leur contexte originel et débarrassés de leur épaisseur initiale et sentimentale ?
Une nouvelle et étrange beauté joue de la répétition comme de la mémoire. Aucune catharsis dans ce procédé, aucun aboutissement ultime, ni pour l'auditeur, ni pour l'interprète : c'est Schubert plutôt que Beethoven, qui pouvait si bien tourner en rond. Plutôt qu'un art de la peinture et de la profondeur, il s'agit ici d'un art de la décoration et de ses bienfaits.
Georges Aperghis
Profils
2001 - pour Françoise Rivalland et Sonia Wieder-Atherton
pour zarb et violoncelle
Durée : 15 minutes
Création : le 21 juillet 2001 au Théâtre du Jeu de Paume à Aix en Provence par Françoise Rivalland et Sonia Wieder-Atherton.
On ne saura rien du drame que semblent énoncer le violoncelle et le zarb des Profils de Georges Aperghis, rien sinon la menace qui filtre de leurs effleurements furtifs et de la violence de leurs affolements. Mais on retiendra l'étrange fascination qui naît du jeu cruel qu'ils se livrent et la puissance libératoire de forces puisées au plus secret d'elles-mêmes par les deux dédicataires de la pièce.
Françoise Malettra
« …comme en musique indienne, se suivre, se perdre, se retrouver… ce serait deux femmes qui parleraient du bassin méditerranéen sans y avoir jamais été… un drame si présent que l’on n’en parle pas, on l’effleure parfois seulement à la fin… »
Georges Aperghis
En Sonate, CD BMG France/RCA red Seal n°82876552732 (2003)
Pubs - Reklamen
2000-2015
Cycle pour soprano solo chanté par Valérie Philippin et Donatienne Michel-Dansac
Durée : 20 minutes
1 Corn flakes
2 Detergent
3 Tooth paste
4 Soft drinks
5 Hydrating cream
6 Video game
7 Shampoo
Il s’agit de la création du premier cahier de réclames (7). Que dans notre vie quotidienne nous soyons entourés d’images et de sons, d’annonces qui nous proposent de combler nos désirs pour plus de bonheur et de confort mais aussi pour créer des désirs que nous n’avons pas encore, c’est une évidence.
Ainsi chaque réclame met en valeur un produit différent (dentifrice, vitamines, boissons, shampoing etc).
Ces pièces se proposent de transposer les contenus de chaque réclame grâce à un traitement vocal spécifique qui créent une tension entre les textes publicitaires et le rendu musical. Elles sont un prétexte pour me permettre de continuer à explorer la voix.
Georges Aperghis
Pour découvrir ces pièces brèves, il suffit de suivre le lien vers l'émission de la journaliste Anne Montaron Alla Breve
Quatre pièces fébriles
1995
pour piano et marimba
Durée : 17 minutes
Création : 1996, Théâtre du renard à Paris, Françoise Rivalland (marimba) et Vincent Leterme (pno).
Les Pièces fébriles sont des jeux de miroirs entre le piano et le marimba, des jeux de résonances - ou des jeux entre les attaques sèches et leur résonance. Des jeux où l'on se perd, ne sachant plus qui est qui - ou quoi est quoi.
Georges Aperghis
R>Z : Rasch | Récitations | Requiem furtif | Retrouvailles | Le Rire physiologique | Ruinen | Les secrets élémentaires | Sept crimes de l'amour | Simulacre | Simulacre III | Situations | Solo | Teeter-Totter/See-saw | The only line | The Messenger | Tourbillons | Tingel Tangel | Trio | Trio pour clarinette, violoncelle et piano | Trio funambule | Uhrwerk | Vesper | Volte-Face | Wild romance | Wölfli Kantata
Rasch
2001
Version I : violon et alto / Pour Irvine Arditty et Geneviève Strosser
Version II : saxophone et alto / Pour Pierre-Stéphane Meugé et Geneviève Strosser
Version III : soprano et alto / Pour Donatienne Michel-Dansac et Geneviève Strosser
Durée : 6 minutes
Création : 15 novembre 2001, Konzerthaus, festival Wien Modern par Irvine Artditty et Geneviève Strosser.
Presto. Il s'agit de rafales de notes jouées par le violon et l'alto. Cela peut ressembler à des répliques, mais ce sont plutôt des enchevêtrements. C'est comme une partie de ping-pong entre les protagonistes.
Georges Aperghis
Récitations
1977 - Pour Martine Viard
pour voix seule (œuvre soliste de musique de chambre)
durée : 45 minutes
Création de l'œuvre (version scénique) : 2 août 1982, Festival d'Avignon, Martine Viard, Michel Rostain (mise en scène).
L'image présentée, une récitation apprise par coeur - celle de l'écolier qui parfois hésite, puis se rattrape - rend plus poétique encore la déroute du sens que permet la répétition machinale.
Daniel Durney
C'est, comme d'autres l'ont dit - mais osons le pluriel : un portrait de femmes. On peut énumérer, répertorier, inventorier (des mots chers au compositeur) les attitudes que le compositeur suggère à chaque instant à l'interprète : déterminée (Récitation 10, partie gauche, 1ère version), câline mais peut-être indifférente (5), contemptrice au bord de la cruauté (13), très jeune fille qui s'ouvre à la vie, écoutant sa maman (8, partie centrale, version verticale), mondaine mais démultipliée (11), acceptant son destin, et presque désincarnée (14)... Parce que chaque Récitation est un minuscule théâtre à soi seul. On joue sur la langue, sur son bruissement. C'est de l'humanité, plus généralement, dont parle le compositeur. Lui se pose dans la situation de celui qui doit inventer le petit alphabet du monde.
Vincent Loizeau
Récitations pour voix seule, par Martine Viard, CD Montaigne Auvidis 782007 - 1995
14 Récitations pour voix seule, par Donatienne Michel-Dansac, CD Col Legno - 2007
Tourbillons/14 Récitations pour voix seule, par Donatienne Michel-Dansac, CD UMLAUT records - 2016
Requiem furtif
1998
pour violon et claves
Durée : 7 minutes
Création : mars 1998, Théâtre de L'aquarium-Cartoucherie de Vincennes, Paris ensemble S:i.c..
"Le Requiem Furtif est une sorte de portrait glacé à la Giacometti" . Dans cette oeuvre, ce sont les quintes des cordes du violon qui servent d'idée de départ (cf. les gammes par tons aux intervalles de neuvième). Le silence est là, trouant un dialogue où chacun essaie d'influencer l'autre, mariage inédit et diabolique, un peu contre nature, d'un instrument rythmique (trois sons de claves différents) avec le symbole romantique de la mélodie.
Aperghis m'a confié que son Requiem (furtif lui aussi) venait du fond sans fond, de l'inconscient d'un rêve : « Dans un cimetière, les arbres. Ils cliquetaient dans le vent, tout le cimetière vibrait de feuilles en bois, solides. »
Mais - et c'est là l'essentiel -, ce rêve, il l'a oublié. Oublié pour commencer. Il n'est revenu qu'après, une fois qu'il s'était écrit (et non illustré) depuis la mémoire enfouie du corps.
Oublions donc le rêve. Le Requiem furtif s'écoute comme un corps à corps entre le violon « vivant » et les claves « mortes ». Comme une étude sur « l'activité et le vide ».
Peter Szendy
Retrouvailles
2013
pour 2 percussionnistes/acteurs
Durée : 9 minutes
Création : le 26 avril 2013, Festival de Witten par Christian Dierstein et Richard Dubelski.
Deux hommes se rencontrent,
On comprend qu’ils se connaissent déjà.
Des fragments de gestes de la vie quotidienne - se taper dans le dos, se serrer la main, partager un verre au nom d’une mémoire commune, etc -
Syllabes et phonèmes tout à fait intelligibles pour eux mais pas pour le public.
Cette courte performance est une construction de situations qui paraissent réels mais qui perdent de leur réalité en raison du traitement de la voix et d’une gestuel.
Georges Aperghis
CD/DVD (Edition du Witten festival 2013), Write, Give a call or Send a fax at : Kulturforum Witten, Bergerstraße 25, 58452 Witten, Tel: 02302.581-2486, Fax: 02302.581-2496, [email protected]
Ruinen
1994 - Pour Vinko Globokar
pour trombone solo
Durée : 10 minutes
Création : 1994, Berliner Festpiele par Vinko Globokar.
Ruinen met en jeu la "vocalisation de l'instrument" et "l'instrumentation de la voix".
L'agencement est fondé sur la confrontation d'une vigoureuse arabesque initiale, fréquemment reprise, avec des grondements chromatiques et des figures acrobatiques où viennent s'incorporer des assauts vocaux musclés. La notation, d'une précision extrême, prescrit à l'exécutant divers modes de jeu dont le changement peut être très rapide : chanté dans le trombone, parlé dans le trombone, inspiration ou expiration conjointe. L'attitude est combative, voire ponctuée de cris belliqueux et d'accents rageurs : au milieu des ruines, l'énergie de la colère, même impuissant.
Christian Fruchart (Extrait du programme Portraits croisés Aperghis/Schumann à la filature de Mulhouse de janvier 2003)
La pièce par Jack Adler Mc-Kean ICI
Le rire physiologique
1982
pour baryton et pianiste
Durée : 17 mn
D'après le sketche de Raymond Devos, une interprétation sur la « constitution du rire », pour une voix et un pianiste.
Cette pièce peut se lire comme une parabole très kagélienne sur le drame du musicien opprimé. Aperghis a composé cette pièce sur le texte de Raymond Devos ou le fantaisiste (ici,un baryton ) martyrise son propre pianiste en l'incitant à rire après lui.
Daniel Durney
« C'est la tragédie d'un pianiste qui ne peut pas rire. Décortiquer le rire, le couper en morceaux, c'est ça qui peut déclencher le rire. Le texte de Devos est terrible. C'est une leçon de rire sur la base de rapports scientifiques... »
G. Aperghis (festival d'Avignon 1983)
Les secrets élémentaires
1998 - Pour Vincent Leterme
pour piano
Durée : 14 minutes
Création : le 17 décembre 2000, Paris/Radio France , concert ensemble S :i.c., Vincent Leterme (pno).
Cette œuvre est écrite sous forme de variation continue d'un unique matériau dont les deux formes, mélodico-rythmique - synchronique et diachronique, se métamorphosent au sein de chaque pièce comme au sein du recueil tout entier .
Les Secrets élémentaires qu'énonce le piano ne renvoient pas à un arrière-fond caché, à une confession romantique qu'ils viendraient traduire. Ce qui s'écrit et s'inscrit ici, c'est, comme le disait Roland Barthes du piano de Schumann, « le corps qui bat ». Car il s'agit avant tout, pour Georges Aperghis, de considérer le pianiste comme doté de dix doigts qui sont autant de « percuteurs indépendants » dans une « polyphonie de couleurs ».
Il s'agit même de remettre à plat, d'aplatir en quelque sorte ce que le piano porte en lui de romantisme : « Comment jouer avec la couleur du piano qu'on entendait, enfant ; comment prendre ces choses si passionnelles (si “romantiques”) pour en faire du papier peint, des à-plats sortis d'un tableau dont on ne verrait plus que quelques détails. Bref, revenir à un piano moins cataclysmique, moins hystérique que ne l'est souvent le piano contemporain ; et pouvoir jouer comme un enfant avec ces trois accords à la Chopin qui m'émouvaient tant. »
J'entends dans les Secrets élémentaires son Mikrokozmosz à lui. Des études de corps, d'organes. Plus que dans le macrocosme de l'esprit, le Grand Jeu se joue dans les détails.
Peter Szendy
Musique(s) de chambre: 5 pièces pour espérou et violoncelle . Faux mouvement . Les secrets élémentaires . Requiem furtif . La nuit en tête, CD Zig Zag Territoires ZZT 020501 - Ensemble S:i.c., 2002
A tombeau ouvert . Les secrets élémentaires . Print Music . Simata . Pièce pour jeunes pianistes, "Works for piano", CD NEOS 10912 - Nicolas Hodges, 2009
Sept crimes de l'amour
1979, pour un film de Michel Fano
pour soprano, clarinette et percussion
Durée : 12 minutes
Création : 1979, IRCAM/Paris, Martine Viard (sop), Michel Portal (cl), Jean-Pierre Drouet (perc) - mise en scène de Georges Aperghis.
"Les sept crimes de l'amour “ impose l'esprit du théâtre instrumental. La partition indique les positions que doivent adopter les trois protagonistes au fur et à mesure des sept pièces. Il s'agit donc bien d'une action, que la musique articule rigoureusement en séquences, sans autre mise en scène que celle imaginée pour produire le son. Des accessoires (aussi symboliques qu'une pomme), l'utilisation détournée des instruments ( le corps de la clarinette sans embouchure, le zarb comme porte-voix...) contribuent à l'aspect scénique.
Daniel Durney
Simulacres, Double CD Accord/Universal, ACRD 4761635 - 2004
A portée de voix, CD/DVD Labem Ameson - 2011
Shot in the dark
2010-2011, for the International Contemporary Ensemble
pour voix et ensemble instrumental - 2 flûtes, 2 clarinettes, cor, trompette, percussion, soprano, piano, 2 violons, 2 altos, 2 violoncelles et contrebasse
Durée : 16 minutes
Création : Columbia Miller Theatre, 2960 Broadway, New York; Ice Ensemble avec Tony Arnold et Ludovic Morlot
Un portrait impossible de femme fluctuant (instrumental et vocal), qui glisse d'un état à un autre comme quelqu'un qui cherche son chemin dans le noir, comme une dérive sans fin, et impliquant l'ensemble instrumental dans son labyrinthe vocal.
Se constituent ainsi une série de séquences comme des images sonores. La voix traverse ces différents espaces, les provoque, les subit, ou joue avec d'une façon versatile; on ne sait plus si c'est la voix qui mène la danse ou l'ensemble instrumental. On a l'impression de suivre les errances des uns et des autres, au travers de fragments contrastés qui se succèdent d'une façon non linéaire.
Georges Aperghis
Pour découvrir la pièce, vous pouvez consulter cette archive vidéo de l'Ensemble Ice
Simulacres
1991-1995 - Pour l'ensemble Accroche Note
Double CD Accord/Universal, ACRD 4761635
Les quatre Simulacres (le premier enregistré en 1991, les trois autres en 2003) viennent ponctuer régulièrement la collaboration de Georges Aperghis avec l'Ensemble Accroche Note. Les trois premiers font appel au trio original de l'ensemble (voix, clarinette, percussion - augmenté d'une clarinette pour le n°III), le quatrième revient à l'instrument solo, en l'occurrence la clarinette basse. Tous valent à leur titre d'entretenir une extraordinaire ambiguïté entre musique et narration.
La percussion et la pulsation initiale (marche chaotique due à la superposition de divisions impaires (triolets pour la clarinette contrebasse, quintolets pour la voix et la percussion) donnent à Simulacre 1 - autant que les deux cadences de clarinette contrebasse et de voix - son aspect à la fois tribal et savant. On y retrouve aussi - une dernière fois dans ce disque - une part de spectaculaire (la voix du percussionniste) qui dirige un grand crescendo, au fur et à mesure alimenté par des interjections comico-dramatiques, jusqu'à ce que la pièce se termine, dans un sprint galérien.
Dans les Simulacres II et III, la percussion est confiée définitivement au seul marimba (comme ensuite dans les Quatre pièces fébriles) et le percussionniste perd sa fonction vocale. Le théâtre, qui transparaît en filigrane, n'est plus amené par des interjections explicites mais plutôt par une dramaturgie du temps.
Le Simulacre II expose les trois parties solistes en monologues successifs et donne l'impression claire d'une scène véhémente, disputée entre trois personnages. Il se termine, comme il a commencé, par la voix seule, qui, finalement, conserve, ses prérogatives.
Le Simulacre III au contraire se présente d'abord comme une pièce brillamment polyphonique. Le doublement de la partie de clarinette ouvre un espace harmonique nouveau entre la voix et le marimba. Là encore la voix est décisive et fait revenir progressivement la pièce à une sorte de conversation. Dans les deux partitions, le marimba donne, par un effet de ritournelle cyclique, un aspect forain et enjoué cher au compositeur, mais bénéficiant d'un traitement tout à fait nouveau dans sa production.
Simulacre IV est un morceau de grande virtuosité où la clarinette basse endosse tous les rôles précédemment découverts dans les Simulacres. L'expressivité, l'étendue des registres offrent à l'auditeur une palette tout à fait extraordinaire de conversation instrumentale, simulacre de grands discours et de confidences.
Antoine Gindt
Simulacre III
1995
pour voix, deux clarinettes et marimba
Durée : 11 mn
Créé le 15 mars 1996 à Liège dans le cadre du festival Ars Musica
La série des Simulacres est dédiée à l’ensemble Accroche Note depuis 1991
Dans Simulacre I, le percussionniste est convié, comme dans des pièces plus anciennes, à des interventions vocales. C’est d’ailleurs une des figures remarquables de ce quatuor que d’observer combien l’écriture devient plus concentrée et comment la voix et les trois instruments sont convoqués, ensemble, d’un bout à l’autre de la pièce. Contrairement aux deux premiers Simulacres, Georges Aperghis abandonne la forme en cadence qui était une espèce de marque de fabrique de ces pièces pour fouiller un développement harmonique et rythmique à trois voix (les deux clarinettes ou la clarinette et l’alto constituant la voix médiane) à la fois plus complexe et plus homogène.
Virtuose, véloce, contrasté, le déroulement de la pièce est caractéristique des préoccupations de l’époque de Georges Aperghis : jamais le temps ne prend un contour abstrait et il se découpe d’une manière séquentielle, tout à fait conforme à une micro-représentation, où le silence et les ruptures, par exemple, prennent un sens tout à fait particulier. C’est ainsi que le théâtre, écarté du dispositif visible, réapparaît comme une mémoire cachée et tout à fait convaincante dans l’organisation de la pièce. On remarquera également comment Georges Aperghis convoque avec brio l’essentiel du vocabulaire qu’il a développé depuis près de trente ans, sans céder à aucun moment à un aspect démonstratif.
Antoine Gindt
Situations
2013 - Pour les musiciens du Klangforum Wien
pour 23 solistes
Durée : une heure
Créé le 20 octobre 2013 au festival de Donaueschingen par le Klangforum Wien dirigé par Emilio Pomarico - Lumières de Philipp Harnoncourt.
Interview de Georges Aperghis au sujet de l'oeuvre. Le reportage du Festival lors de la création ici.
Il s'agit d'une pièce de concert, "d'une soirée musicale" pour les 23 musiciens du Klangforum Wien.
L'œuvre est composée de fragments de différentes couleurs et de matières contrastées qui se juxtaposent ou se superposent pour construire des polyphonies changeant sans cesse.
La pièce avance par zig-zag en donnant des éclairages successifs et inattendus d'un même matériau.
Ce matériau musical (dont l'énergie circule entre les solos, duos, trios, sous-ensembles, grands ensembles, textes dits ou chantés...) est appréhendé de façon singulière par chaque musicien, ce qui en fait une série de portraits.
Ces esquisses de portraits musicaux des interprètes se superposent et se répondent comme dans une grande conversation.
C'est par des dérives successives que je suis arrivé à cette proposition à partir d'une idée initiale qui était d'écrire un concerto grosso.
Je me réserve pendant les répétitions de mettre en œuvre certaines idées que j'ai eu en travaillant sur cette pièce quant à une légère théâtralité possible, ceci sans déconcentrer l'auditeur du projet musical. G.A
Pour en savoir encore plus sur cette œuvre, lisez l'analyse d'Eleni Ralli sur notre page de TXT.
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Solo
1983
écrit pour Edith Scob, comédienne
Mise en scène d'Edith Scob et Michael Lonsdale
Représentation 19 juillet 1983 Festival d’Avignon
A travers un ensemble de pièces très courtes, le temps de traverser une scène et d’y tracer son chemin par la clarté de quelques allumettes frottées, une femme se raconte. Métaphore de la traversée qui se donne à voir comme passage existentiel, ou bien décryptage de la somme des attitudes contenues dans l’instant totalisateur d’une vie au féminin ? En construisant la matière de sa partition sur le langage parlé, jeux de mots-sons destiné à une voix de comédienne, Georges Aperghis fixe les repères d’une théâtralisation du son. A l’interprète d’organiser leur articulation dans l’espace, pour restituer l’ensemble des perceptions, à partir desquelles, facettes après facette, son identité se met au monde.
Teeter-Totter/Seew-saw
2006/2008 - Pour le Klangforum Wien
pour ensemble instrumental
Durée : 15 mn/10 mn
Créations :
Teeter-Totter, le 18 octobre 2008 - Donaueschingen Musiktage, Klangforum Wien, Emilio Pomarico (dir).
Ensemble Klangforum – direction Emilio Pomarico .
Seesaw, le 4 février 2010 - Musiekgebouw, Amsterdam, Klangforum Wien, SYlvain Cambreling (dir).
Bascule, dont le mouvement repose sur les lois de l’équilibre, “jeu d’alternance, d’élévation, d’abaissement et de reversement”.
Jeu, système de bascule qui consiste à maintenir un équilibre de force entre deux tendances en s’appuyant alternativement sur l’une ou sur l’autre. Système de balance qui consiste à rétrograder après s’être avancer, à défaire après avoir fait.
(Définition du dictionnaire)
Teeter-Totter . Contretemps . Seewsaw . Parlando, CD Kairos 0013222KAI
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
The only line
pour violon seul légèrement amplifié, 2008 ET pour violon et électronique, 2009
Durée : 8 minutes
Création : 7 juillet 2008, Bayesrisches Staatsoper de Munich par Hae-Sun Kang.
Parmi les tensions des champs magnétiques, les pressions harmoniques, les tentations de devenir multiple, une ligne seule trace son chemin de fuite. Haut perchée, tendue, elle continuera à graver son trajet telle une pointe sur le métal.
Georges Aperghis
The messenger
2019 - Pour Vanessa Porter
Durée : 10 minutes
Création : 20 septembre 2020, Kölner Philharmonie par Vanessa Porter
A messenger coming from nowhere :
...distress calls often repeated...
...no assistance...
...no one come...
...distress signals ignored...
...they were very little more than voices...
...several days adrift...
...I was silent for a long time. Now I want to tell you...
Georges Aperghis
Tourbillons
1989 - Pour Martine Viard
pour voix seule. Regardez Tourbillons sur le net
Durée : 12 min
Création le 16 septembre 1990, Festival Musica de Strasbourg, Martine Viard.
De sable qui (des) chassait des papillons (fort vent) vent qui soufflait fort chassait tourbillons (très) le fort de sable (vent tourbillons) de sable très le sable (tourbillons) chassait très fort des vents (fort) les soufflait chassait qui fort (fort soufflait) tourbillons (très) de qui de sable chassait (le sable chassait) le vent très très (de) soufflait le chassait (qui le vent soufflait) qui des (très) soufflant tourbillons fort (très de sable) chassait fort très (vent) chassait – soufflait fort qui le (très sable) tourbillons vent fort des sables qui chassait (tourbillons des) soufflait les tourbillons soufflait le (fort) chassait des vents qui forts tourbillons qui très – très fort (de) sable soufflait (des) soufflait très qui (très) chassait vent (des forts vents) le tourbillons soufflait des vents de sable qui tourbillonnent (de sable) forts chassait) tourbillons le chassait vent (des qui) le soufflait très – très –très fort chassait (très) tourbillons le vent soufflait de sable (vent soufflant de sable qui) fort tourbillons (qui le très) qui soufflant vent très soufflait tourbillons de sable (chassait très de) sable des forts (des tourbillons – vents chassait) le vent qui soufflait très fort chassait des tourbillons de sable.
G.A.
Tingel Tangel
1990
pour soprano, accordéon et cymbalum
Durée : 25 mn
Création : Tthéâtre Garonne de Toulouse en avril 1991, par Frédéric Davério (accordéon ), Valérie Philippin (soprano) et Françoise Rivalland (cymbalum).
Tingel Tangel ( en allemand, “cabaret de bas étage “ ) se présente comme une suite de 10 pièces courtes :
- Prologue
- Intermède 1
- Masques
- Intermède 2
- Premier amour
- Speakrine
- Les équilibristes
- Mélodrame
- Pas à pas
- Salto mortale
Je pensais, en écrivant , à des représentations joyeuses de la mort, à des masques, à du cirque, à des “numéros” mélodramatiques. Cependant, “ Tingel Tangel “ n'est pas une pièce à mise en scène ; c'est une pièce de concert sur la clownerie métaphysique, grotesque, la mort.
Cette pièce est dédiée à Frédéric Davério, Valérie Philippin et Françoise Rivalland.
Georges Aperghis
CD Tingel Tangel - Jactations, Vand’œuvre Réf. 0426 / Distribution Muséa, Metamkine, les Allumés du jazz, Improjazz -
Trio
2011 - Pour le Trio Arbos
pour piano, violon, violoncelle
Création le 5 novembre 2012 à l'Auditorium National de Musique de Madrid par le Trio Arbos. Commande du Trio et de la Fondation BBVA. Ecoutez, Regardez le Trio Arbos
Cette pièce est une construction volontairement précaire faite d'énergies très contrastées passant sans lien apparent du minimalisme au maximalisme.
Comme si les trois musiciens étaient "photographiés" dans des états très différents entre secret et paroxysme.
Le passage non linéaire d'une énergie à l'autre (créant une sorte de "clair-obscur") devrait donner l'impression d'une action intime qui se libère parfois dans des explosions tonitruantes sans lendemain.Le "minimalisme" l'emporte toujours. G.A
Trio pour clarinette, violoncelle et piano
1996
Création : 31 janvier 1998, Maison de la radio à Paris, ensemble Accroche Note.
« L’originalité de Georges Aperghis ne se limite pas à une activité de pionnier dans la sphère du théâtre musical, mais son flux relève d’une dramaturgie propre à l’absolu de la musique de chambre. Ainsi le trio pour clarinette, violoncelle et piano est une succession d’épisodes que l’on jurerait inspirés par la vie quotidienne : rencontres houleuses, esquives spirituelles, démarcations espiègles et vigoureuses.... Le tout agencé sans aucun risque d’anecdote. »
Pierre Gervasoni, Le Monde, 4 février 1998
Trio Funambule
2015 - Pour le Trio Accanto
pour saxophone, piano et percussion
Création : 6 février 2015, ECLAT festival - Stuttgart par le Trio Accanto : Nicolas Hodges (pno), Marcus Weiss (sax) et Christian Dierstein (perc)
Commande de la SWR et du Trio Accanto (avec le soutien de la Fondation pour la musique Ernst von Siemens)
Durée : environ 12 minutes
"Ma première idée était d’écrire des séquences très brèves et ensuite trouver une « syntaxe » qui me permette de les enchainer de manière abrupte, sans développement, casser l’idée d’une ligne continue au profit d’un dépaysement constant, (aidé notamment par les changements de couleur de la percussion). En travaillant sur les différentes combinaisons j’ai soudain pensé à des situations de cirque, à des funambules etc. passant d’un espace sonore à l’autre souvent d’une façon paraissant arbitraire. C’est pour cela que j’ai choisi pour la percussions des instruments comme la flûte à coulisse le flexatone, la scie musicale etc. Evidemment ces « situations », ces « personnages » sont purement musicaux. Il n’y a pas de théâtre, rien à voir excepté les trois interprètes en situation de concert."
Propos de Georges Aperghis recueillis à l'occasion de la création
CD WERGO 7358 2
Uhrwerk
2011 - Pour Geneviève Strosser
pour alto solo
Durée : 10 minutes
Création : 12 juin 2014, Théâtre de Genevilliers par Geneviève Strosser.
Uhrwerk, littéralement : mouvement d’horlogerie — l’une de ces mécaniques cliquetantes dont Aperghis est friand, qui se détraquent ou s’emballent. Une mécanique réglée au plus juste, comme ces jeux de trains électriques sur les voies desquels on lance les convois en guettant le prochain croisement. L’alto y incarne tous ces trains circulant à pleine vitesse, comme autant de personnages éclatants d’un théâtre imaginaire à la dramaturgie trépidante.
Jérémie Szpirglas
Volte-Face
1997 - Pour Geneviève Strosser
pour alto seul
Durée : 12 minutes
Création : 1998, Génève par Geneviève Strosser
Volte-Face pour alto solo est comme une danse rêveuse exécutée sur la pointe des pieds, et qui change perpétuellement de direction. Elle ose telle ou telle pirouette, piétine littéralement puis s’en va avec de petits trottinements tout en pizzicatos. La musique consiste à permuter de petites cellules, en répétitions « infidèles » ou « variations sans thème ».
Mais au fond, c’est Geneviève Strosser, qui a travaillé depuis 1996 dans de nombreuses productions d’Aperghis, qui décrit le mieux l’essence de cette musique : « Elle a quelque chose d’un kaléidoscope. Il y a une foule de petits éléments, toujours les mêmes – et quand on les tourne et retourne, ils prennent chaque fois une autre figure, ils composent une autre image ».
Patrick Hahn (propos extraits du disque Crosswind)
Crosswind . Alter ego . Rasch . Volte-Face . Signaux, CD Kairos 0012942KAI
Vesper
1970 - Oratorio de Georg Friedrich Händel, pour 7 voix et 22 instrumentistes
pour 2S.M.S..CT.2T.B — 1.1.4.0 — 1.0.4.0 — timb - 2 perc - org élec - clavecin — 0.0.1.1.4
Durée : 30 minutes
Création : 16 novembre 1971, Bordeaux, Sigma, Ensemble Polyphonique de l’ORTF Charles Ravier (dir.)
Composé en 1970 et créé au Sigma de Bordeaux 1971 par L’ensemble Polyphonique de l’O.R.T.F sous la direction de Charles Ravier, « Vesper » fait intervenir un baryton solo, cinq chanteurs, quatre contrebasses, quatre trombones, quatre clarinettes, une flûte, un clavecin, un orgue positif, deux percussions, un violon (qui joue également de la vielle à roue), un violoncelle (qui joue également de la viole de gamme), deux flûtes à bec (qui jouent également du cromorne, du cervelas, de la musette, etc.).
« Vesper » est un sujet de Roussel dans « Les impressions d’Afrique ». Je prends ce sujet comme base. Deux parties : dans l’une, Haendel fait une conférence… reprends des bouts d’explications de programmes de concerts… Les amis de Haendel sont autour de lui, lui donnent des conseils. Je veux montrer dans quel monde on vit ! En deuxième partie, on entend ce qui reste soi-disant de l’oratorio ( Haendel n’a jamais écrit « Vesper »). J’utilise de « Jeu de la Croix » que j’ai trouvé dans la littérature éElisabéthaine et qui est d’une terrible cruauté : c’est un dialogue de bourreaux, mettant des clous m « Non pas là… plus bas… Laisse moi cogner, j’ai bien déjeuné, je suis plus fort », etc. Enfin, en coda, Haendel explique pourquoi cette œuvre a été brûlée ! »
C’est parce que quelqu’un avait dit devant lui q’un thème reste banal qu’Haendel, selon Raymond Roussel, aurait voulu montrer qu’il pouvait composer un oratorio sur un thème pris au hasard. L’œuvre va donc se construire comme à tâtons.
A l’époque de Haendel (1685-1759), deux genres musicaux s’opposaient : l’oratorio, monde fermé, et l’opéra, monde ouvert. De cette constatation Georges Aperghis va nourrir les contrastes et les conflits de sa pièce. Il commence par l’opéra (qui rappelle les échecs successifs de Haendel dans ce genre) pour finir par l’oratorio (qui vite le triomphe de Haendel à Londres).
Cinq parties :
Première partie : 1. Chorale 2. Black and White Ballad
Deuxième partie : 3. Fragments 4. interlude blanc 5. Fragments 6. Aris (cruxification et finale)
Propos de Maurice Fleuret extraits du XXVIème festival d’Avignon - 27 juillet 1972
Wild romance
2005 - Pour l'ensemble Talea
pour soprano et ensemble
Durée : 16 minutes
Création : 23 octobre 2015, Festival Transit - Louvain, par l'ensemble Talea, Donatienne Michel-Dansac (sop) et James Baker (dir).
Dans cette pièce l’ensemble instrumental joue le rôle d’un révélateur. Il provoque la mémoire de la voix. Celle-ci retrouve ainsi des fragments d’un souvenir enfoui, souvenir sûrement douloureux à en croire les tensions exacerbées que cela provoque entre la chanteuse et l’ensemble. Donc pas d’histoire précise, seulement des éclats d’une mémoire perdue : on peut imaginer que quelque chose de très violent s’est passé jadis, quelque chose que l’on s’est empressé d’oublier. Ainsi pendant la durée de la pièce on assiste à l’apparition graduelle d’images sonores qui tentent de recomposer le puzzle d’une mémoire et qui peu à peu disparaissent à nouveau jusqu’au silence.
Georges Aperghis
Consulter la partition sur le site ISSUU, c'est ICI
Wölfli-Kantata
2005
pour six voix solistes et choeur mixte, sur des textes d'Adolf Wölfli
Durée : 60 minutes
Création : le 22 juillet 2006 au festival Eclats, Stuttgart, Neue Vocalsolisten Suttgart, Choeur de la SWR, direction Marcus Creed.
La Wölfli - Kantata se divise en 5 parties :
Petrrohl pour 6 voix solistes
Die Stellung der Zahlen pour choeur mixte
Vittriool pour 6 voix solistes
Trauer-Marsch pour choeur mixte
Von der Wiege bis Zun Graab pour solistes et choeur.
Cantate a capella pour six solistes vocaux et choeur mixte, autour de la personnalité et l'oeuvre d'Adolf Wölfli. Cette cantate s'inspire du travail textuel et pictural d' Adolf Wölfli et développe certaines pulsions qui s'y trouvent (remplissage excessif et compulsif de l'espace, énumérations de chiffres, inventaire, répétitions rituelles, détails agrandis inconsidérement, surchargés, détournés sans cesse de leur sens premier, polyphonies saturées etc) tout en gardant une distance, une ”harmonie", qui canalise ces débordements et proliférations. Il s'agit donc d'architectures créant des espaces fictifs, parfois reconnaissables, se combinant entre eux d'une manière furtive et éphémère. Ces figures musicales essaient d'y trouver leur chemin comme dans un labyrinthe, puis finissent par tout envahir, abolissant ainsi le silence, instaurant un fonctionnement organique mais indolore.
Georges Aperghis
A lire sur notre ce site : un essai sur la Wölfli-Kantata
par Evan Rothstein, musicologue, Université de Paris 8